Premier long-métrage d'un réalisateur déjà à la tête de quelques séries phares telles Sherlock et Peaky Blinders, The Girl With All the Gifts adapte à l'écran et enrichit la nouvelle de 2014 signée Mike Carey, encrée dans un monde post-apocalyptique où les zombies côtoient des humains aux méthodes radicales pour atteindre leur salvation... Ce contexte vu et revu à travers tout medium se révèle dans ce film comme paradoxe, une force aux multiples faiblesses. Ne boudons pas notre plaisir de voir un tel environnement post-apocalyptique qui, sur grand écran, apporte un bon bol d'air frais. Nous n'y voyons pas les zombies dans leur chair habituelle, ici de moisissure et de poussière, cachant quelques rares parcelles d'humanité sous la putréfaction. Sans compter la figure de l'enfant au centre de l'histoire, dérivation de ce mythe connu de tous et aux secrets aguicheurs.
Sauf que dans The Girl With All the Gifts, la nature du zombie est démontrée, scientifiquement applicable (l'auteur s'est inspiré d'un véritable champignon qui contamine et contrôle le système nerveux de fourmis amazoniennes, un anecdote terrifiante). Ça nous change, certes, mais le film va par conséquent à l'encontre totale de la nature première du zombie au cinéma, faisant dos à toute puissance métaphorique. Cette figure à toujours le symbole de quelque chose... pas ici. Heureusement que le vrai fond du film se trouve ailleurs, mais il se voit indubitablement étouffé par la surexplication : cette irritation passe constamment à travers le personnage de Glenn Close, biologiste vecteur de conflits qui passe son temps à expliquer la moindre parcelle de mystère.
Autre comble du film : il souffre indiscutablement de passer après le jeu vidéo The Last of Us. Les zombies contaminés par un champignon, le décor des villes abandonnées où la verdure reprend ses droits, la relation d'un adulte et d'un enfant sans lien de parenté qui réapprennent l'amour et le sacrifice... Si le spectateur a déjà pris la manette en main, il est inévitable de rapprocher les deux œuvres et de s'interroger (toute mesure gardée) sur la pertinence de l'exercice : film à part ou adaptation non-officielle ? La question demeure.
Mais The Girl With All the Gifts ne mérite pas que l'on se laisse contaminer par ces quelques défauts, car son scénario cherche aussi au-delà : le fond n'est pas dans son contexte, mais dans l'acceptation de ce dernier. C'est un film relativement mélancolique sur la résignation, la conscience cruelle de la fin de notre monde et l'acceptation des sacrifices et autres chemins qui doivent être pris. En ça, après un premier acte intense et passionnant, le métrage se révèle plus posé, installant ce qui peut être vu comme une vraie fable écologique.
Dans cette mesure apparaît l'autre grande surprise du film : son incroyable économie de moyens malgré toutes les choses qu'il parvient à faire passer. Tourné pour seulement 4 millions de £, l'exercice trouve ses plus grands moments de tension dans sa retenue : l'invasion de la base par les zombies dans le premier acte, apocalypse constamment dans le flou de l'arrière-plan, ou encore cette scène incroyable où nos personnages passent en silence au milieu d'une légion de zombies endormis, où tout réside dans le découpage impeccable des plans et la mise en scène du regard... Même la crédibilité totale du décorum post-apocalyptique, tout comme la puissance des images du dénouement, s'avèrent assez incroyables pour un si faible budget.
Et s'il y a bien un élément qui porte le film sur ses épaules, c'est la jeune Sennia Nenua dans la peau de l'héroïne Mélanie. La vraie condition de ces enfants spéciaux restant dans l'ombre, couplé à la posture de la petite actrice, ce quelque chose dans son regard qui passe de l'innocence touchante à la sauvagerie primaire, rendent chez elle ce mystère animal surnaturel parfaitement icônisé. Une révélation qui nourrit la bonne surprise qu'est The Girl With All the Gifts, beau et habile, qui aurait toutefois mérité plus de secrets pour pleinement embrasser sa dimension tragique.
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