Allaiter un bébé de « Yorgos Lanthimos », c’est faire face à ses principes, remettre en question ses croyances, et mettre son appareil de subjectivité en mode avion. Le bébé dit Lobster n’est pas une exception de telle règle, il vous met additionnellement dans l’obligation de fixer quelques hypothèses zéro : le monde est rempli par des poupées biologiques, la bisexualité n’est pas une orientation sexuelle, n’y a pas de nombres non entiers dans les seizes vestimentaires, et les aristocrates ont du sang bleu. Le film part du postulat que les états ont promulgué une loi empêchant les individus de rester singles, au risque de se voir transformer en des animaux de leurs choix.
Le Casting est excellement bien réussi, et l’équipe d’acting est la mieux placée pour établir un des piliers caractéristiques du monde « anti-célibataire », multiples acteurs ont pu bel et bien être machinales et robotiques dans leur interprétation, et faire disparaitre leurs émotions dans les instants les plus intenses et émouvants de notre story dimensionnellement surréaliste. Partant du personnage principal, David, un architecte reflétant, cold, fertile, désobéissant, avec les grimaces inchangeables, le visage amorphe, et les yeux qui font le noyau du dernier acte, et à travers lesquels, on se déplace dans ce monde imaginaire, on jauge les facteurs clés de visionnage, et on creuse continuellement dans les secrets géographiques, humaines, naturalistes, et communautaires de l’univers « Lobster ». J’applaudis à la manière de son introduction au spectateur assoiffé (après la scène pré-générique). Colin Farrell a bien cerné le besoin d’interprétation de cette histoire d’auteur, et a professionnellement fait l’exercice. Les autres chefs d’écran sont dignes du nom, même si une certaine curiosité vis-à-vis les impulsions, et les forces motrices de leurs personnages, n’a cessé de me fréquenter durant le film.
Le film manque de background, et entame sur le champ ses événements en phase d’exécution d’une loi fataliste et étrangère, j’aimerais bien qu’une séquence pour fixer les choses et démontrer le texte réglementaire ait remplacé un petit nombre de scènes dépourvues de sens, ou qui contribuent (excessivement) à l’instauration de ce qui reste de l’idée de départ. La première moitié nous photographiait un monde peuplé par les chiens, déterminé par rapport au drame homme-femme, et qui croit en la capacité des fistons à garder le sens, et établir un équilibre relationnel autant que démographique ; un univers qui a banné l’amour de la liste des motifs de la chimie binomiale. Cette première tranche narrative se distingue par une méthode discrète, impulsive, rigoureuse, et offensive, même si la comédie a pu trouver une place parmi ce mélange hytérogène. La deuxième partie stimule l’ouverture d’esprit et l’évasion de notre réalité, mais aussi la tendance des appareils gouvernementaux à tuer le droit d’expression et à fermer la gueule intellectuelle. Ceci sans oublier que le scénariste a sacrifié le découlement causal correcte, et l’intrigue appropriée et intéressante , en faveur de ses messages philosophiques, sociales, et étatiques, audacieux !