Force est de constater que les années 2000 ont marqué un gros déclin du cinéma américain. Peu de bons films chaque année, alors que la quantité ne cesse de croitre... J'appelle ça le phénomène Jerry Bruckheimer, ou la science du film "préfabriqué" (applicable aux séries par ailleurs). Un cahier des charges unique, un montage épileptique, un format maitrisé, et surtout, on reste en tous publics (dérogations pour du moins de 12 ans accordées au compte goutte).

Dans un domaine particulier qui faisait la force du cinéma outre-atlantique, le thriller (Le silence des agneaux, Seven, Usual Suspect...), ces mêmes années signifient la montée en puissance du cinéma coréen. Non pas qu'ils réinventent la poudre, les sujets ayant déjà été abordés à quelques exceptions près (Old Boy notamment). Non, ce qui fait que les coréens déboitent, c'est leur technique irréprochable, et surtout, que chez eux, le cinéma, c'est un truc d'adulte. Non, ils ne vont pas couper ou édulcorer des films pour que les gosses de 12 ans puissent bouffer du pop corn dans les salles de ciné.

Ajeossi, c'est l'histoire d'un type mystérieux, ex-taulard ou un truc du genre, qui prête sur gage dans une banlieue pourrie. Une gamine, visiblement à l'abandon, plutôt crade, habituée aux petits larcins, détestée dans son milieu scolaire, se prend d'amitié pour cet homme triste qui, c'est déjà ça, ne la rejette pas. Du moins pas tout le temps.

La gamine en question a mal démarré dans la vie. Famille de cas sociaux, mère strip-teaseuse et héroïnomane. La mère qui profite d'une opportunité pour s'emparer d'un bon paquet de dope, de quoi passer la prochaine année sur Jupiter, à l'aise.

Mais il y a un hic, un piment rouge dans la sauce (celui qu'on cherche désespérément et qu'on finit par croquer, vous voyez) : les propriétaires du magot sont deux frères particulièrement infréquentables, qui donnent dans un tas d'activités bien dégueulasses mais lucratives, parce qu'il faut bien remplir le frigo.

Entré malgré lui dans le règlement de compte, notre prêteur sur gage va tenter de leur louer ses services pour arranger la situation. Et évidemment, ça part en couille.

Le sujet, proche dans son déroulement de TAKEN, sorti 2 ans avant, ne surprend pas. Si j'ai vraiment aimé ce film, c'est parce que j'ai vu une bonne vingtaine de thrillers coréens avant lui, et que je n'avais, comme à mon habitude, ni lu le synopsis, ni regardé la bande annonce.

Ainsi, bien que me doutant de la force du héro, j'ai pris de plein fouet sa montée en puissance. Et, ayant vu d'autres films, je savais que la petite fille pouvait crever, sans aucun problème de conscience (ces foutus réalisateurs n'ayant aucune morale). Donc, même s'il est plus classique que les autres, je ne l'ai pas vraiment ressenti.

Ce film m'a plu par le décalage entre l'ambiance noire et ses personnages hauts en couleur. Certains y voient un produit grand public et édulcoré : je ne suis pas d'accord. On parle ici de trafic d'humain en tout genre, on nous montre concrètement comment ça marche, et certaines scènes sont particulièrement violentes, à mille lieux du truc familial. Le film réussit un bon équilibre entre sujet sérieux et divertissement.
Petit reproche sur l'écriture du hero tout de même : sa prestation dans Mother écarte toute critique quant à son jeu d'acteur, mais certaines répliques sont clairement en trop, surtout vers la fin.

Au niveau réalisation, c'est un bijou, comme souvent avec le cinéma coréen. Tout est fluide, inspiré, lisible et bien monté.

Au final, on part en exploration dans les bas fonds de Séoul et du marché asiatique de l'être humain, "réputé" mais peu connu, à travers un film au rythme allant crescendo jusqu'à son final ahurissant.

A voir absolument.
SoiM
8
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le 29 août 2014

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SoiM

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