Intriguant, déroutant, The Master.
Avant toute chose, il convient de rendre honneur à Joaquin Phoenix. On dit souvent d’un acteur qu’il est excellent ou qu’il est habité son personnage. Joaquin Phoenix est, ici, un cran ou deux au-dessus, livrant une performance extraordinaire, métamorphosé aussi bien dans son physique, sa démarche, sa façon de parler,… tout. Face à lui, Philip Seymour Hoffman et Amy Adams ne déméritent pas, mais il leur est difficile de faire face. Leur talent trouve aussi écho dans un autre registre, avec des personnages plus froids, calculateurs et magnétiques.
Prenons tout de même les choses dans l’ordre.
Avant tout, impossible de ne pas avoir dans The Master une grande maîtrise de la part de Paul Thomas Anderson. Plans impeccables, musique immersive, lumière, tout est maîtrisé de bout en bout. Là-dessus, pas de soucis, Mister Anderson gère bien la partie réalisation. On sent une volonté de livrer un Grand Film avec tous les moyens qui vont avec.
Après (et un après, qui sonne comme un mais), la partie scénario m’a laissé plus dubitatif. Plus de 2h de film, il faut du contenu, mais là aussi il y a de la matière tout va bien. Par contre, le tout m’a semblé un peu décousu et bancal avec une amplification au fur et à mesure que le film avançait. Et cet aspect-là m’a plus gêné.
Le lien entre les deux personnages principaux n’est pas non plus très évident, on voit ce que le personnage de Joaquin Phoenix tire de celui de Philip Seymour Hoffman, la réciproque m’a paru plus obscur.
A propos de ces personnages d’ailleurs, (j’y inclus celui d’Amy Adams, la femme du Master, secondaire dans la distribution, centrale dans l’histoire), ceux-ci font définitivement la force du film. Freddie (Joaquin Phoenix), homme totalement détruit par la guerre, complètement paumé, rempli de violence et de désespoir qui se détruit doucement mais sûrement. Lancaster "The Master" Dodd est bien plus ambigüe, et on touche là le sujet des sectes. Le rapport entre les deux personnages est d’ailleurs particulièrement fort, bien plus que le sort des vétérans (via Freddie) ou comment monter une secte en 10 leçons (via Lancaster). La première séance entre les deux hommes, où Freddie doit répondre aux questions sans cligner des yeux est tellement forte qu’elle en devient vite insoutenable.
Au final, un film fort, un casting impeccable mené par le vrai Master, dit mister Phoenix mais un scénario qui a vraiment peiné à m’emporter.