Après un premier film, très indépendant, remarqué par la critique, et le public ciblé, Mike Flanagan rempile pour raconter une histoire à nouveau basée sur une variation du film de fantôme. Cette fois c’est un miroir démoniaque, qui emprisonne les âmes de ceux qui tombent sous son charme. Les poussant à commettre meurtres et autres folies.
Exit le financement via Kickstarter, ‘’Oculus’’, adapté d’un court métrage de Flanagan, est produit par Blumhouse. Une boite de production qui durant les années 2010 a essayé de relancer un système de production à l’ancienne, en ce qui concerne le genre horreur/épouvante.
C’est à l’initiative de son créateur Jason Blum que l’on doit par exemple l’épouvantable ‘’Halloween’’ de 2018, mais aussi l’excellent ‘’Lords of Salem’’ en 2012 (Le chef d’œuvre de Rob Zombie), les funky ‘Happy Death Day 1&2’’ (2017-2019), ou l’énorme ‘’Get Out’’ en 2017. Bref, Blumhouse c’est une société qui pèse dans le paysage de l’Horreur hollywoodienne, pour le pire comme pour le meilleur.
En ce qui concerne ‘’Oculus’’, c’est du tout bon, et c’est co-écrit avec Jeff Howard, co-rédacteur des scénarios des trois films de Flanagan qui suivent, ainsi qu’une collaboration sur ‘’The Haunting of Hill House’’. Bref ‘’Oculus propose un voyage au cœur d’une famille dysfonctionnelle, tient donc, réduite en morceau par le poids d’un méchant miroir sur leurs existences. Rien que ça.
Kaylie, et son frère Tom tout fraichement sorti de l’hôpital psychiatrique, retournent dans la maison de leur enfance, où sont morts leurs parents. Afin d’y affronter leurs démons, mais aussi essayer de comprendre l’épreuve qu’ils ont traversé. Le récit, construit sur deux timeline différentes, une qui suit Kaylie et Tom adultes, et une autre les présentant dans leur enfance, au moment du drame.
Sans abuser des effets faciles, jumpscare et autre violons grinçants, c’est avant tout par la psychologie des personnages, et la descente aux enfers du père, que se créé une angoisse palpable. Faisant sans cesse des allers-retours entre passé et présent, allant par moment jusqu’à faire cohabiter les deux timeline dans même un plan. Tom est par exemple filmé adulte, la caméra fait un contre-champs et il est face à sa Kaylie enfant. Un procédé qui permet de perdre le spectateur/rice pour mieux le surprendre.
Mais ‘’Oculus’’ n’est pas le genre de production qui se croit maline à jouer avec son audience. Loin de là. C’est même tout le contraire, puisque comme dans ‘’Absentia’’ il est demandé à ceux et celles qui regardent le film de fournir un effort. Différents éléments, qui aident à la compréhension du récit, sont ainsi disséminés un peu partout durant le métrage. En rater un peu provoquer une désorientation de plusieurs minutes, avant de pouvoir raccrocher les wagons de l’intrigue. Ce qui créé vraiment une sensation de déboussolement, avec par moment un rythme qui s’accélère, notemment lors des séquences horrifiques.
Sur ce point le film remplit parfaitement le contrat, puisqu’il est des plus généreux. Sans s’adonner à l’horreur pure, c’est par l’épouvante qu’il remplit parfaitement le pari. Avec un jeu de lumière favorisant la présence d’ombres, qui sont parfois plus que cela. Ou rien que la manière dont le miroir est mis en scène. Responsable de toutes les mésaventures qui arrivent aux personnages, jamais une glace n’aura été filmée avec une aura aussi démoniaque, sans artifices d’aucunes sortes. Juste un miroir.
C’est la construction du récit, et les deux arcs narratifs mélangés dans les timeline, qui donnent vie au miroir. Par ce que racontent les protagonistes, par leur vécu, et ce qui choisit d’être montré à l’écran. Ce n’est pas juste un gimmick basé sur du vent. Le miroir a de la texture, du caractère, comme le personnage à part entière qu’il est. Et ça marche, il fait peur.
Il se retrouve dans ‘’Oculus’’ les thématiques déjà présentes dans le précédent film de Mike Flanagan. La cellule familiale dysfonctionnelle en tête, mais également cette idée de la disparition et du deuil difficile. À l’addiction, alcool/drogue, c’est cette fois la maladie mentale qui est placée au centre de l’intrigue qui concerne la construction du personnage de Tom. Reconnu cliniquement fou, sa condition demeure floue, restant en suspens durant tout le métrage. Une fois de plus c’est à ceux et celles qui suivent de se faire leur propre avis. Leurs propres interprétations.
La dernière séquence est en ce sens dramatiquement forte, puisqu’elle fait exploser toutes les thématiques minutieusement distillées durant le métrage. Un choix artistique, et une démarche déstabilisante, qui témoigne que le film est réfléchi comme un tout, et non comme une accumulation de scénettes ‘’flippantes’’ sans aucunes structures. Comme il est devenu un peu le cas dans les fictions d’épouvantes actuelles.
Intelligemment construit, finement écrit, s’il n’est pas exempt de certains défauts, inhérents à toutes premières œuvres, il est toutefois possible de voir en ‘’Oculus’’ le patron utilisé par Mike Flanagan dans ses films suivants. Des paternes récurrents, que ce soit dans sa mise en scène posée, et élégante, dans ses jeux de lumières, et dans les thématiques qui parcourent l’intégralité de son œuvre.
Un film à voir comme la véritable naissance d’un cinéaste riche et passionnant, appelé à monter en puissance.


-Stork._

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le 13 févr. 2020

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