Il y a deux choses de tristes qui sont arrivés à la fin de la projection de The Neon Demon, premièrement se dire que l'on ne verra plus de nouvelles oeuvres de ce grand cinéaste avant quelques années, et deuxièmement recevoir le palmarès du festival de Cannes. Mais ça, c'est autre chose.


Le rêve est au coeur de The Neon Demon, la fascination pour le corps aussi. Mais surtout, le psychédélisme. On est secoué dès le début du film par la musique ennivrante de Cliff Martinez en accord parfait avec ces vagues d'images défilantes de regards, tous aussi perçants. Que ce soit celui assez fragile d'Elle Fanning ou bien ceux de ses collègues machiavélique.


The Neon Demon se découpe en deux parties réelles, une partie en disant beaucoup sur l'Amérique comme le fut à son époque l'incompris Showgirls de Verhoeven, comme quoi, il faut peut-être ne pas être américain pour faire des films pareils. Et une deuxième plus outrancière, où, dès que l'on se dit que Refn ne fera pas tel ou tel chose car il n'a pas les couilles de le faire, il le fait. Peu étonnant que la critique soit, bien évidemment, divisé. Mais je suis persuadé que dans quelques années, tout le monde découvrira la vérité sur ce nouveau chef d'oeuvre, comme la réputation d'Only God Forgives qui est, selon mon impression, en train de remonter peu à peu que le temps avance.


Ce qui est fascinant avec The Neon Demon, et on le remarque dès la deuxième séquence, c'est cette opposition entre ces corps fixes et ces mouvements de caméra virtuoses. Chaque personne est ici réduit à l'état d'objet, morts comme vivants, la réalité est déformé mais sert une mentalité, un propos. Et ce propos est celui d'une amérique rongée par la violence, la jalousie et le désenchantement. Tout ça est servie par une inventivité du style, un jeu de mise en scène incroyable.


La musique de Cliff Martinez apparaît ici comme un coup de boomerang dans la face à chacune de ses apparitions. L'oeuvre n'a pas peur du silence, ce silence provoque la froideur, et la musique provoque un trip psychédélique puissant. C'est le même compositeur que Drive et Only god forgives, et pourtant, l'émotion est tout autre.


Et cela me permet d'en venir à la singularité de cette oeuvre, on retrouve les mêmes éléments, les mêmes thématiques si chères au cinéaste, la même image contrastée (qui s'explique par le fait qu'il soit Daltonien) et pourtant le film est nouveau en tout point. Le cinéaste ne se répète pas. Il aborde le thème de l'érotisme et le traite à merveille. Et pourtant, pas une personne ne baise. Mais peu importe, l'émotion reste la même. Les corps restent sublimés, principalement celui d'Elle Fanning (qui n'avait pas 18 ans au moment du tournage je rappelle mes gros dégueulasses).


Cette actrice joue son rôle à la perfection. Faisant ressentir par sa voix et son visage sa fragilité, sa tendresse, mais aussi sa déshumanisation. Et j'aimerai vous partager mon avis sur ce personnage. Au début, on entend Fanning dire pourquoi elle avait choisi le mannequinat : elle ne savait pas bien écrire, peindre, n'était pas très intelligente, mais elle était belle. Curieux lorsque l'on a écouté pendant de nombreuses heures Nicolas Winding Refn, et que lui-même explique pourquoi il avait choisi le cinéma, il n'était pas beau, ne savait pas peindre, mais ce qu'il savait faire, c'était du cinéma.


Et, peu avant la mort de son personnage, Fanning atteint un degré de prétention incroyable, et c'est en partie ce qui la conduira jusqu'à la mort. Ce qui rejoint la fameuse réputation que se fait Refn depuis quelques années auprès de ses nombreux détracteurs : un être prétentieux. Et je pense que ce personnage nous dit qu'il a bien pris conscience de cette possibilité, et de ses dangers, mais qu'il n'en a rien à foutre, et qu'il continuera à faire des films aussi superbes. Et cette petite moquerie rejoint probablement ce générique de fin, prenant place au ralenti sous un soleil couchant, dans le désert, sans aucuns liens avec le film. Je pense qu'il s'agit plus d'une moquerie que d'un réel aveu de prétention de sa part. C'est trop gros.


The Neon Demon est une oeuvre incroyable en tout point, perturbante, psychédélique, érotique, sublime, puissante et audacieux, et c'est, je pense, ce dernier élément qui en a énervé et en énervera plus d'un.

Caïn_Hamilton

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