Après son prétentieux et plutôt agaçant Birdman, le mexicain Alejandro Gonzalez Inarritu revient sur le devant de la scène avec The Revenant, l'histoire vraie de Hugh Glass, trappeur aguerri forcé de lutter contre la nature et ses dangers pour retrouver l'assassin de son fils. Une quête de justice vengeresse aux portes d'un voyage existentiel.


Commençons par le principal atout de The Revenant : sa beauté. Le film jouit en effet d'une photographie à couper le souffle. Le grandiose des paysages n'a d'égal que la texture si particulière de la lumière naturelle, sublimé par le travail génial d'Emmanuel Lubezki. L'utilisation quasi-permanente de la steadycam permet de créer une fluidité sans pareille, jonglant avec maîtrise entre le chaos et la tranquillité, pour nous offrir des images jamais vues auparavant (en témoigne la scène de l'attaque de l'ours, tout simplement dantesque). Indéniablement, le nouveau film d'Inarritu est visuellement inoubliable.


On retrouve également une thématique chère au cinéaste : la fatalité, dans tout ce qu'elle a d'aléatoire et de tragique. Ainsi, à la manière du héros de Birdman qui tente de se donner la mort sur scène pour atteindre le succès qu'il espère, Hugh Glass doit se transcender, abattre les frontières entre l'homme et l'animal pour dompter la Nature impétueuse.


Malheureusement, The Revenant s'avère être un film de forme avant tout, et le fond semble bien fragile pour tenir le film sur la durée. Beaucoup de jolis plans s'avèrent tout compte fait assez "gratuits" et le cinéaste semble se réfugier derrière la beauté plastique de son film, incapable d'y insuffler un vrai message, fort et apte à être questionné par le spectateur. Le film reprend d'ailleurs beaucoup d'influences d'autres cinéastes sans vraiment s'en servir pour créer du sens. Ainsi, difficile de ne pas penser à Terrence Malick (avec qui il partage le même chef-opérateur) mais aussi et surtout à Andreï Tarkovski, dont l'ombre plane sur tout le film. On retiendra d'ailleurs deux reprises directes de sa filmographie : le plan d'ouverture (qui reprend celui de Stalker) et la forêt inondée (reprise de L'Enfance D'Ivan).


Le film souffre également d'une impression générale d'arrogance de la part du cinéaste. Inarritu semble exhiber sa mise en scène pour nous en mettre plein la vue, et ce de manière assez lourde et indigeste. Cela se ressent également à travers la performance de DiCaprio, bien moins inspiré que dans ses précédents films (notamment Aviator de Martin Scorsese).


Au final, le constat est assez négatif compte-tenu du manque cruel d'éléments sémantiques dans ce film. The Revenant est donc un exercice formel avant tout et malgré le travail incroyable de Lubezki, le film m'a laissé aussi froid que le climat qu'il met en scène. Un vrai pétard mouillé.

Bewaretheblob
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le 6 mars 2016

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