"C'est l'histoire du plus grand cocu de l'univers."



THE REVENANT


Réussite esthétique exceptionnelle, The revenant souffre cependant de nombreux petits défauts qui finissent par en former un gros. (Si c'est trop long, car c'est trop long, passez directement aux trois derniers paragraphes. ^^)


Nous avons là une incroyable expérience visuelle où le metteur en scène de Birdman et Babel est constamment au service de la nature sauvage qu'il filme et dont le réalisme photographique est absolument bluffant. Entre les plans séquences virevoltants et l'authenticité des paysages, nombreuses sont les images qui marqueront durablement la rétine.


Si l'immersion est presque totale (j'y reviendrai), ressentir la douleur et les galères du héros sont plus compliquées. En effet, alors que notre héros subit les forces incontrôlables de la nature en mode Die hard, le spectateur ressent aussi beaucoup trop de longueurs qui ne servent pas forcément le parcours brutal des personnages que l'on suit.


Ce qui fait la force du lent rythme d'un film comme Le nouveau monde de Malick c'est sa puissance spirituelle, la caractérisation de ses personnages par des questionnements métaphysiques et philosophies. Si je cite ce film (le seul que j'aime) de Malick, c'est que The revenant s'en rapproche beaucoup dans le ton et les ambitions esthétiques. Au contraire, donc, Alejandro González Iñárritu n'arrive pas toujours à nous délivrer et nous faire partager les intentions de son personnage principal. Nous le suivons avec pour seule et maigre interrogation de savoir quelle sera sa prochaine galère au lieu d'être tendu comme un string pour savoir comment il va s'en sortir.


C'est maintenant que j'en reviens à "immersion presque totale". En effet, tous les défauts cités plus haut sont le fruit de nombreuses petites maladresses. Par exemple, il est très facile de sortir du film au détour de certains effets spéciaux complètement ratés au beau milieu d'une expérience qui se veut réaliste et authentique. Il y a aussi des excès dans les péripéties qui mettent à mal le héros. En effet, comment ressentir la solitude, la peur, la faim, la soif, la douleur ou la peine d'un personnage qui paraît en toutes circonstances invincible ?


De cela naît, au coeur du film, un manque flagrant de tension et de suspens alors qu'en même temps on s'émerveille devant la beauté de la nature et le talent des équipes techniques du long-métrage. Que penser au final d'une histoire qui n'existe pas vraiment, mais d'une performance visuelle hors norme ? En étant tout à fait objectif, même si The Revenant n'est pas un exemple d'intensité et d'écriture, il en découle un énorme plaisir à vivre quelque chose d'organique et de relativement marquant.


Il faut souligner en gras la performance mémorable de Leonardo Dicaprio se donnant corps et âme aux bonnes volontés de son metteur en scène. Alors que le récit ne l'aide pas à nous faire ressentir les sensations de son personnage, il arrive à nous délivrer cette sensation d'épuisement avec une grande force. Si ce n'est pas le rôle le plus marquant de sa carrière, c'est certainement l'un des plus exigeant physiquement et psychologiquement. Tom Hardy se défend tout aussi bien, ainsi que les seconds rôles et figurants en tout genre.


Pour conclure, l'expérience visuelle mérite de se vivre au cinéma même s'il ne restera pas forcément le grand monument du cinéma qu'il aurait pu être à l'arrivée à cause de ses défauts de facilités et d'excès de confiance d'un réalisateur qui en favorisant le visuel en a délaissé le contenu.

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le 24 févr. 2016

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Massil Nanouche

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