Kids, Bully, Ken Park, Wassup Rockers... sont autant de films issus de la contre-culture américaine dépeignant la white trash sans concessions ni afféteries. Un cinéma : celui du photographe et cinéaste Larry Clark qui, d'une oeuvre à l'autre, s'attèle d'une certaine façon à faire encore et toujours le même film, une Oeuvre obsessionnelle sur l'adolescence, ses codes et son indépendance. The Smell of Us, dernier passage à l'acte de l'auteur de Tulsa, fleure bon le parfum d'une jeunesse shootée à hauteur d'épaule, de kids défoncés au sexe, au skate, à la drogue et à l'argent ( pas si ) facile. L'esprit de Clark, avec un brin de complaisance et beaucoup de respect pour ses personnages, trouve avec The Smell of Us une nouvelle justesse de ton, pouvant transparaître cette fois-ci dans un nouveau décor : les rues et appartements parisiens, qui sont filmés de la même façon que les rues new-yorkaises et les résidences californiennes. Larry Clark a changé de lieu mais pas de style, montrant sans démontrer et filmant sans sur-filmer des adolescents allant de mal en pis au gré des métrages. L'ado white trash, ni plus ni moins.


Le réalisateur, depuis ses débuts, semble davantage à l'aise dans les univers microcosmiques que dans les espaces plus vastes, plus globaux. The Smell of Us parle sur le mode de l'intimité, du singulier, comme un photographe appréhenderait un sujet : dans des rues crasses, aux abords d'un skatepark, dans un chambre baignée de fumée ou encore dans un appart' doré. Clark sublime ses adolescents pour un constat terrible de leur évolution, évolution finalement assez stagnante depuis Kids, réalisé il y a maintenant 20 ans. Violences, prostitution, inceste, alcoolisme, fumette... Les agissements et le fait de subir n'ont pas changé, ce sont les modes d'expression qui ont évolué : internet et les nouveaux supports, le voyeurisme chevronné et le filmage obsessionnel. Peu présents à l'écran, grotesques lorsqu'ils le sont, les adultes de The Smell of Us sont une nouvelle fois sur la sellette de Larry Clark, impuissants face à leurs gosses perdus en pleine guérilla sexuelle et virtuelle. C'est - pour employer un néologisme de circonstance - proprement impactant.


Il est entendu que ce nouveau long métrage n'a rien d'un avertissement, bien trop pessimiste pour se permettre de mettre en garde les nouvelles générations qui sont déjà véritablement informées sur les déviances diverses. Le signal d'alarme est bel et bien déjà tiré depuis pas mal d'années, et l'éducation de nos futurs kids semble de plus en plus difficile à appréhender. Et si à l'heure du tout-internet le point de non-retour avait déjà été franchi ? Un film absolument terrifiant.

stebbins
9
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le 31 août 2015

Critique lue 257 fois

stebbins

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