Au premier abord, The Square apparaît comme un film de plus critiquant la société et les êtres qui la peuplent. Effectivement, Palme d'Or rime souvent avec satire et ce long-métrage n'en est pas l’exception. Pourtant, Ruben Östlund utilise ici des procédés plutôt convaincants qui sortent de l'ordinaire, le plus considérable étant la figure répétitive du singe. Ce singe est d'abord représenté en tant que tel chez Anne, journaliste et amante d'un soir de Christian. Il est, par la suite, évoqué dans le personnage d'Oleg, mi-homme, mi-singe qui terrifie tous les invités lors d'un dîner de gala. Cette allégorie est une réelle idée de cinéma : représenter de manière figurative l'enjeu même d'un film. Est-il le représentant de l'Homme dans son état naturel, c'est-à-dire avant que la société vienne le corrompre ? Sans doute. Mais le cinéaste ne s'arrête pas là, il crée avec The Square la représentation d'un humanisme oublié : « The Square est un sanctuaire où règnent confiance et altruisme. Dedans, nous sommes tous égaux en droits et en devoirs. » Christian et son ego surdimensionné s'imagine faire partie de cet humanisme. Il n'est pas étonnant d'entendre résonner l'Ave Maria en boucle. Mais lorsqu'une fillette sans-abri est utilisée pour la promotion de l'exposition avec ce message : « Quel degré d'inhumanité faudra-t-il atteindre pour toucher votre humanité ? », le monde de Christian s'écroule avec lui. Les innombrables plans d'escaliers représentent cet effondrement, notamment ceux en colimaçon où la caméra, parfois en rotation, s'élève pour créer une impression de vertige et de spirale infernale dans laquelle Christian ne saurait s'évader.
The Square est un film riche de sens qui, malgré ses longueurs, se distingue par une satire puissante qui fait réfléchir sur la véritable nature de l'être humain.