Vu au Festival de cinéma de Douarnenez 2014, THE TRIBE est réellement un film violent et choquant. Parfois il peut provoquer une profonde malaise. Comme certaines critiques récentes l'ont mentionné, le réalisateur au nom imprononçable est, cinématographiquement et violemment parlant, dans la même voie d'Ulrich Seidl et de Michael Haneke : des adolescents d'un internat spécialisé pour sourds se forment en tribu pour le vol, le viol, la tuerie et la prostitution. En plein début, on découvre très vite les décors pauvres, sans valeurs, sombres et froids avant qu'on n’aperçoive les longs plans-séquences — il en a filmé 23, selon les médias, ce qui explique la "lenteur" du film. Clairement, de ma part, il n'est pas si lent que cela : cette lenteur se rapproche à la vie, la réalité qui nous permet de prendre le temps de respirer et de comprendre visuellement, vu que ce n'est ni sous-titré ni vocal : seulement en langue des signes ukrainienne et du bruit sonore. Ensuite, les scènes de violence s'ensuivent petit à petit, juste après la présentation des personnages, tous interprétés par des acteurs sourds non professionnels sauf un qui est entendant : celui en tenue chic qui gère la prostitution est en réalité l'interprète au profit du tournage. En tant que cinéphile sourd, THE TRIBE ne rend pas forcément hommage au cinéma muet : c'est la réalité dans le monde des sourds, celui de Kiev en Ukraine. On se pose des questions dans ce film, comme par exemple "Comment se fait-il que ce pensionnat n'ait pas d'éducateurs ?" — il faut bien comprendre que, selon les voyageurs sourds français, l'Europe de l'Est vit dans le misère et dans l'ignorance, d'où l'absence des éducateurs dans certains internats. En ce qui concerne le choc, c'est les séquences inattendues : l'érotisme, la prostitution des deux jeunes filles sur un parking de routiers malpropres, le bizutage par les plus vieux de la tribu, les trafics, l'avortement dans la salle de bain... Ce N'EST PAS un film SUR la communauté des sourds et SUR les difficultés sociales, il s'agit d'un film dramatique comme les autres. En revanche, ce n'est ni la violence ni le choc qui nous empêchera pas de le voir.

PhilHanras
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le 21 sept. 2015

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Phil Hanras

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