Après un Poulet aux prunes (2011) moins convaincant que Persepolis (2007) et une Bande des Jotas passée totalement inaperçu (2012), Marjane Satrapi réalisait le Prix du jury et du public du Festival de Gérardmer édition 2015. The Voices fut longtemps un de ces scénarios de la fameuse black list,ces scénarios jamais faits mais qui s'avèrent loués pour leurs qualités. Mark Romanek devait initialement le mettre en scène avec Ben Stiller en rôle titre, mais cela ne s'est pas fait pour des questions de budget. Satrapi repris le projet avec Ryan Reynolds et le film se tourna en 2013 avant de finir à Sundance l'année suivante... puis ce fut le vide intersidéral durant un temps avant son passage à l'Étrange festival et à Gérardmer jusqu'à sa sortie nationale ici.
The Voices est clairement un film atypique dans le paysage horrifique actuel. Ce n'est pas un film trop gore, ni un film à jump-scares à la mécanique tellement huilée qu'on la repère à vingt kilomètres (coucou Jason), ni un film totalement sérieux. On peut même dire que c'est un des films d'horreur les plus colorés de ces vingt dernières années ! D'autant que Marjane Satrapi utilise son concept jusqu'au bout, quitte à déranger à des moments précis.
Ryan Reynolds trouve un rôle intéressant (comprendre loin du moulin à parole habituel) avec ce personnage aux troubles de la personnalité ne prenant pas ses médicaments. Ce qui lui donne une vision fantasmée de sa vie où ses animaux lui parlent et où les gens qu'il tue lui causent à travers leurs têtes tranchées mises soigneusement dans le frigo. Satrapi va alors s'amuser lors d'une scène à montrer le véritable quotidien de son personnage principal, finalement inconnu du spectateur puisqu'il en a eu une idée faussée jusqu'à présent. Une version beaucoup moins glamour et qui épouse pleinement le point de vue du "héros" et ce même si certaines scènes mettent en avant des personnages extérieurs.
Reynolds va même assez loin, puisque c'est lui qui double les animaux, amenant une transposition de son personnage à travers une sorte de bien (le chien) et de mal (le chat) personnifiés, comme on peut le voir dans pas mal de films d'animation. A la différence que là cela amène à tuer ou pas.
L'acteur s'avère impeccable et Satrapi s'en sort plus que bien pour son premier film en anglais. D'ailleurs, même le héros a une manière cocasse de tuer ses victimes, tenant de l'accident délirant (il faut le voir pour le croire) dans au moins deux cas. Puis ce n'est pas tous les jours que vous verrez un sosie asiatique d'Elvis qui fait du kung-fu ou le Christ qui chante.