Foyer d’une culture hautement familiale, l’Italie et tout ce qui s’en rapproche laissent encore quelques exceptions à étudier. Ridley Scott espère donc réconcilier son public à son style, malgré les défauts qui l’arpente encore. L’intrigue œuvre essentiellement à faire ressortir ce qu’il y a de bon et de mauvais chez l’homme, contaminés par les vices et soumis au propre pouvoir qu’il s’autoattribue. La genèse de l’avarice est une source inépuisable de malveillance et plus le mal a de pouvoir et plus grand sera son exploitation sur l’écran. Si le bon scénario aide le réalisateur à revenir en force, ce dernier se laisse séduire par des caricatures trop académiques pour son salut.


L’argent est une plante carnivore qui se nourrit de l’envie et de la gourmandise de tous ceux qui le convoite. On le comprend rapidement à nos dépens. À la disparition du petit-fils de l’homme le plus fortuné du monde, sa réaction contre rançon est le silence, parole du sage ou bien alors du dragon qui dort sur son tas d’or. Ainsi, John Paul Getty Sr. (Christopher Plummer) endosse le masque du mal qui ignore tout de ce qu’il possède réellement, contrairement à la mère de Paul. Tout le monde finit par se disputer la chair de ce jeune garçon qui subit durement la misère dont il était censé être écarté. Paul constitue la poule aux œufs d’or qu’il faut exploiter à tout prix. Il fallait donc un arbitre impartial dans la résolution d’une enquête qui traîne. On le retrouve en la personne du chef de la sécurité du milliardaire, Fletcher Chase (Mark Wahlberg). Et bien que les interactions avec l’oncle Picsou semblent des plus attractives et des plus ambitieuses, le reste concernant la prise d’otage est plus fastidieux à contempler. On nous promène parfois sur des lignes qui ne font que gagner du temps. Puis dans ce froid, qui aurait pu rendre le combat de Paul plus intrigant, on observe une once de chaleur grâce à Cinquanta (Romain Duris). Membre des kidnappeurs et principal interlocuteur entre les deux camps, sa motivation reste à revoir, car elle n’aboutit pas à quelque chose de concret et de crédible.


Scott réduit un peu son film à un simple discours moral sans nuances. Ce sentiment de facilité n’est pas toujours présente, bien entendu. On en trouve tout de même, mais la plupart des tentatives sont rapidement désamorcées par le schéma qui se répète sans cesse. Les négociations butent sur un désaccord sans concession. Ce n’est qu’après un temps que la mère sera autonome. Avant cela, elle reste aussi bien enchaînée à la fortune de son beau-père, qu’à son fils par ses kidnappeurs. Michelle Williams donne pourtant du corps à son personnage et Abigail Harris gagne peu à peu en empathie. Mais ce travail perd en efficacité. Malgré tout, on finira par prendre conscience de la valeur de l’argent au détriment d’une vie, qui plus est au sein de sa propre famille.


Au bout d’un parcours rempli, Scott se relâche de nouveau dans ses réalisations mais il n’y a aucun mal à en relever que le meilleur de ce qu’il a à offrir. « Tout l’Argent du Monde » (All the Money in the World) sonne comme un bâillement de sa part, à la fois paresseux dans l’exécution, mais on retrouve toujours une certaine maîtrise dans l’art de manipuler le suspense et de travailler une mise en scène policière de qualité.

Cinememories
6
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le 7 déc. 2022

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