Si se retrouver au chômage partiel et dérouiller les projecteurs une fois par semaine durant le confinement fût un crève cœur, voir certains films comme Forte et Artemis Fowl pour ne pas les citer, balancés sur les plateformes plutôt que d’avoir une exploitation en salles fût presque un soulagement. Tout simplement noir initialement programmé durant la période de confinement faisait partie de ces films qui auraient pu passer par cette voie directe de la SVOD, et je me suis moi-même demandé si cela n’était pas un bien, tant les pièges étaient nombreux avec un tel thème. Comme en attestent les propos de Léa Salamé, pour ne pas la citer non plus, qui a fait preuve de tact comme à son habitude disant à Fary concernant les récents événements dont le meurtre de George Floyd et la sortie du film : « vous avez eu une chance folle ! », la patate, à savoir Tout simplement noir, était plus un condiment avec lequel on pouvait se brûler qu’un met opportuniste.
Sans demi-mesure, Jean Pascal Zadi et John Wax ont préféré faire exploser chacune des patates chaudes dans ce terrain miné du racisme. C’est tout une une philosophie de fauteuil rouge : rentrer dans le lard plutôt que d’y aller avec des gants.
JP, un acteur raté de 40 ans, décide d’organiser la première grosse
marche de contestation noire en France, mais ses rencontres, souvent
burlesques, avec des personnalités influentes de la communauté et le
soutien intéressé qu’il reçoit de Fary, le font osciller entre envie
d’être sur le devant de la scène et véritable engagement militant…
La plus grande réussite du film, au-delà de celle de rassembler un casting hors-norme (impossible de les énumérer tant les guest sont nombreux), est dans sa variation des situations comiques. Le rire émane de la gêne, du silence, du ridicule autant que de l’autodérision. Si le fond politique est maîtrisé -et l’opération était délicate, la forme permet une suite de scènes aussi absurdes, hilarantes que dévergondées et osées. Force et faiblesse de Tout simplement noir, le format documenteur scande chaque puissante scène en un film délié. Chacun retiendra ses scènes favorites, personnellement celle de Lucien Jean-Baptiste et Fabrice Eboué s’autocritiquant sur leurs films respectifs que sont La Première Etoile et Case Départ est un travail remarquable de recul sur leur oeuvre. N’est pas Ken Loach qui veut… Les autres, celle avec Vikash Dhorasoo sur ses cheveux lissés et les tacles qui lui sont lancés sur sa carrière de remplaçant visent toujours justes. Celle avec Kassovitz lors d’un casting est également finement écrites. Rien n’est éludé, ni Dieudonné, ni les dents avancées de Jean Pascal Zadi ! Bref, ce type de cinéma soutenu par Gaumont fait un bien fou dans le paysage cinématographique français autant que dans les salles cet été…
Critiques imagées sur mon blog : https://lestylodetoto.wordpress.com/2020/07/15/tout-simplement-noir-lard-den-prendre-plein-les-dents/