Un commando constitué de fortes têtes, une rivalité rosbif/yankee amusante, quelques japonais stratèges à dessouder et une jungle malfamée à traverser pour parachever une mission suicide, il n’en faut pas plus à Aldrich pour habiller avec énergie près de 2h30 d’une fresque guerrière qui ne fait pas dans la dentelle.


Ne vous fiez pas à ses premières minutes bon-enfant, bien vite la nature humaine reprend ses droits histoire de rappeler qu’en temps de guerre les bas instincts sont plus libres de s’exprimer qu’à la vie civile. Un mort ne bronche pas quand on le charcute pour le dépouiller de ses bijoux, un vivant ne moufte guère davantage s’il se fait occire par surprise. Dans la lignée des 12 salopards, sans toutefois atteindre son panache, Too late the hero rappelle qu’il n’y a point de héros sur le champ de bataille, juste des hommes qui tentent de tourner une situation macabre à leur avantage.


Si l’on ne saura remettre en question la noirceur de sa proposition, il est plus difficile de passer à la démonstration d’Aldrich quelques points d’écriture particulièrement cavaliers. Ses scènes les plus marquantes notamment, à savoir la boucherie qui prend place sur le champ de bataille juxtaposant le camp britannique est quelque peu discutable. D’un point de vue militaire, c’est même carrément aberrant (ouais monsieur, j’ai un bac+12 à Soldier of fortune et je seekais du high skillède sur clanwar pour aller mettre des têtes sur 1.6, alors pour parler stratégie militaire, j’suis au point). Dans un contexte voulu sérieux, ça pose donc un petit problème de crédibilité, même si l’intérêt du film est ailleurs.


Dans sa galerie de fortes têtes habiles des cordes vocales notamment. Menée par un Michael Caine impeccable, elle n’est constituée que par des personnages peu impliqués qui n’ont qu’une envie : éviter le combat à tout prix. Où souvent dans les films du genre, il y a au moins un prodige du terrain qui sauve les miches de tout le monde, dans Too late the hero, tous les membres de l’escouade ont le même rôle : celui du couard qui essaye d’abréger sa punition.


Dommage qu’avec autant de chouettes éléments, Aldrich peine à livrer un enrobage à la hauteur. Niveau mise en scène, c’est assez avare en idées marquantes, c’est bien torché mais sans plus, comme si l’important ici était le propos, le but à atteindre et que l’enchaînement des événements pour y parvenir importait moins. C’est triste parce qu’il y avait matière à livrer quelque chose de plus inspiré, notamment dans la dernière partie qui consiste en un jeu psychologique finaudement mené par un commandant Japonais aux neurones saillants. Mais non, Aldrich narre cette partie comme le reste du film, efficacement mais sans réelle proposition. Quant au dénouement du jeu mental, il est tout simplement manqué.


Et pourtant, malgré ces réserves, j’ai beaucoup de sympathie pour Too late the hero. Le fait que Michel Caine soit de la partie y est pour beaucoup mais pas seulement. Même s’il est moins impactant que Les 12 salopards par exemple, on y retrouve quand même la touche Aldrich, des personnages détestables et des prises de décision salaces à leur hauteur. Et en dépit de sa mise en scène fonctionnelle, à aucun moment on ne s’ennuie, preuve que le bonhomme sait cultiver l’intérêt. Et puis la bande son est réussie, avec ses thèmes récurrents qui rappellent certaines bobines du cinéma d’horreur. Un moment sympa en somme, ni plus, ni moins.

oso
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le 7 août 2016

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