1993 : Tony Scott épouse Quentin Tarantino.

Et c'est durant cette même année que ces deux élus accouchent de leur bébé, qui est aujourd'hui devenu grand : j'ai nommé "True Romance".

Bon, je fais parti de la catégorie de personnes qui ont été touché par la mort de Tony, alors que d'autres personnes s'auto-légitiment pour dire que le frère Scott n'emporte pas avec lui une filmographie très scintillante. Je pense notamment à certains papiers de journalistes prétentieux ne proclamant qu'un certain type de cinéma, qu'une certaine école. Oui, Tony était avant tout un publicitaire. Mais il savait se servir d'une caméra et d'une table de montage.

Bref, je ne suis pas là pour accuser, mais plutôt pour commenter un grand film. Le meilleur film de Tony Scott, selon moi.
"True Romance" est un film qui traverse le temps. C'est un film qui parle de cinéma, qui lui témoigne tout son amour. C'est un film qui a de gueule, car le casting est brillant, l'écriture est parfaite et la réalisation a du style.
Oui, le style de Tony, qui était, en 1993, un peu plus sage que dans les années 2000.

"True Romance" est un film à la fois beau et violent.
Beau, parce qu'il met en perspective un couple unique. Clarence et Alabama Worley. Deux cramés du cerveau. Deux personnes qui n'ont pas peur de la vie. Deux personnes qui s'aiment, qui se regardent avec respect, même lorsque leur visage pisse le sang. Clarence est un fan de cinéma, un lecteur de comics. Mais sous ce profil de geek, se cache un homme macho, qui sait magner le revolver, insulter les grosses crapules et négocier une valise entière de coke. Alabama est une femme souriante, généreuse sentimentalement parlant et qui vit dans son monde (ce qui lui donne parfois un air de gamine). Mais c'est surtout une femme marquée par la vie et qui libère une violence incontrôlée. Le couple Worley construisent ainsi leur bonheur sur la violence de leur univers évolutif. Ils sont à la fois insouciants, naïfs, intentionnés et courageux. C'est un couple atypique et Rock 'n' Roll. C'est un couple bercé par l'oeuvre d'Elvis. Elvis est d'ailleurs le guide spirituel de Clarence, une sorte de lumière vocale et physique qui le guide tout au long de son aventure.
C'est un film violent parce que le monde de la mafia y est dépeint dans ses traits les plus rudimentaires : drogue, prostitués, meurtres, tortures, etc. "True Romance" offre donc des scènes violentes, sanglantes, voire dures. Mais le film soulève aussi la faiblesse de ces monstres humains, comme lorsque un homme de main avoue avoir gerbé lors de son premier "client", pendant qu'il tabasse Alabama dans sa chambre d'hôtel. Ou lorsque Vincenzo Coccoti se souvient de n'avoir tué personne depuis 1984, alors qu'il en train de flinguer le père de Clarence. C'est une façon d'exprimer qu'on ne devient pas un monstre facilement, que cela demande du temps et des sacrifices moraux.

"True Romance" se repose donc sur un récit admirablement bien écrit, dans ses scènes, dans ses dialogues (merci Quentin !) et qui trouve un aura charmeur et touchant, de part l'empreinte esthétique de Tony Scott.

C'est aussi un film qui repose sur son casting. Très peu de productions filmiques réunissent un Brad Pitt en junkie camé jusqu'aux os, un Christopher Walken en tonton flingueur tiré par quatre épingles, un Dennis Hopper en papa raté, un Gary Oldman en dreadreux balafré et un Tom Sizemore en flic survitaminé. Et quand tu vois qu'un Samuel L. Jackson apparaît à l'écran une minute, avant de se faire assaisonner salement au fusil à pompe, là tu te dis que c'est luxueux !

Bref, "True Romance" jongle avec plusieurs sentiments : la joie amoureuse, la violence sociétale et humaine, le rêve américain, ou encore le charme des supports artistiques (cinéma, musique, BD, etc.). En fait, tout le monde peut s'y retrouver à un moment ou un autre. C'est ce qui fait de ce film, un film unique, un film au charme fou !

Tony, en revoyant ton film, je ne peux que saluer le travail de Hans Zimmer qui a intitulé sa musique phare par une phrase qui t'est tout particulièrement destinée aujourd'hui : "You're so cool" !