C'est du cinéma pur. Mariage improbable de Twin Peaks et Sleepy Hollow, Twixt est une pépite cinématographique. Après le décevant Tetro, Coppola - qui n'a plus rien à prouver - puise dans la tradition du conte gothique pour évoquer sans le dire la mort de son fils.

La trame narrative est simple et classique. On y trouve la figure de l'écrivain alcoolique et criblé de dettes, catapulté dans le trou du cul du monde, là où de bien étranges événements se sont jadis déroulés. Perdu le jour mais éclairé la nuit, le héros trouvera dans ses rêves la matière d'un livre à venir. À travers ce livre et le récit tragique d'assassinats d'enfants, il revivra la mort de sa fille dont il se sent responsable.

Coppola compose son film comme s'il était peintre. L'éveil est coloré quand le rêve est noir et blanc incrusté de couleurs. À peine descriptible, le résultat est d'une rare beauté. La lumière, les contrastes, la manière dont chaque personnage est éclairé différemment des autres, les apparitions de Virginia, des enfants, d'Edgar Allan Poe, toutes traitées comme des collages à même l'image, concourent à la puissance onirique et profondément originale du film. On est dans un récit fantastique, mais aussi dans une toile expressionniste, un montage de Gilbert & Georges... L'incroyable travail de Coppola et de son chef opérateur sur le matériau numérique, ouvre la porte à tous les possibles.

Mais Twixt est aussi un film léger, une anecdote, une historiette racontée sur un coin de table. Très souvent drôle, puisant dans l'imagerie gothique la matière d'un récit terrible, le film garde du conte l'illustration naïve et la narration édifiante. Cri d'amour pour l'enfant disparu, Twixt est aussi le portrait bouleversant d'un père qui a perdu pied. Gras et un peu grotesque, mais profondément touchant, Val Kilmer est parfait. La jeune Elle Fanning est diaphane et belle à souhait, tandis que Bruce Dern est irrésistible en shériff en mal de célébrité.

Maîtrisé de bout en bout, tourné en dehors du système, film profond d'une élégante légèreté, Twixt est juste éblouissant.
pierreAfeu
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Top cinéma 2012

Créée

le 20 déc. 2012

Critique lue 332 fois

1 j'aime

pierreAfeu

Écrit par

Critique lue 332 fois

1

D'autres avis sur Twixt

Twixt
guyness
4

Tourné autour du Poe

Tous ceux qui regrettent la mort prématurée de certains de leurs artistes préférés ont sans doute bien tort. En effet, pour un Hendrix, une Mozart ou un Tony Scott (naaan, je déconne, je vous laisse...

le 20 déc. 2012

40 j'aime

11

Twixt
Spark
6

C'est l'histoire d'un livre qu'est l'histoire d'un film qu'est l'histoire...

Pour n'avoir vu de Coppola que Apocalypse Now – qui est à mon sens le film le plus surestimé de l'histoire du Cinéma – je suis allée voir Twixt sans m'attendre à un film qui me parlerait, mais avec...

le 5 févr. 2012

31 j'aime

7

Twixt
Pravda
7

S'abstient de la blague trop facile du "Twixt : deux doigts coupe-faim". Oups.

Je ne connais quasiment pas le cinéma de Coppola, je n'ai même pas vu Apocalypse Now, c'est vous dire. -- placez vos huées / jets de tomates ici -- Pour cette raison j'abordais ce film sans rien en...

le 11 mars 2014

28 j'aime

9

Du même critique

Nocturama
pierreAfeu
4

The bling ring

La première partie est une chorégraphie muette, un ballet de croisements et de trajectoires, d'attentes, de placements. C'est brillant, habilement construit, presque abstrait. Puis les personnages se...

le 7 sept. 2016

51 j'aime

7

L'Inconnu du lac
pierreAfeu
9

Critique de L'Inconnu du lac par pierreAfeu

On mesure la richesse d'un film à sa manière de vivre en nous et d'y créer des résonances. D'apparence limpide, évident et simple comme la nature qui l'abrite, L'inconnu du lac se révèle beaucoup...

le 5 juin 2013

51 j'aime

16

La Crème de la crème
pierreAfeu
1

La gerbe de la gerbe

Le malaise est là dès les premières séquences. Et ce n'est pas parce que tous les personnages sont des connards. Ça, on le savait à l'avance. Des films sur des connards, on en a vus, des moyens, des...

le 14 avr. 2014

41 j'aime

21