Je partais avec l'idée que j'allais regarder un film pour bobo (moi et mes à prioris...) montrant non sans prétention à quel point l'amour est complexe et insaisissable... Et Two lovers confirma en effet plus ou moins ce que j'en attendais. Mais je dois être une bobo inavouée (ou peut-être que je devrais juste arrêter d'assimiler films et catégories sociales, voir même que j'arrête de raisonner par catégories sociales), parce que ce genre de film, ça me parle. Two lovers c'est typiquement le film où, même si les personnages sont plutôt attachants, tu ne peux pas les pifrer. En tout cas, moi je ne peux pas. Et pourquoi ? Parce qu'ils sont trop humains, qu'ils se voilent la face, qu'ils suivent bêtement leurs passions, qu'ils font des (grosses) erreurs, qu'ils agissent en contradiction avec leurs valeurs ou leurs intérêts... Et ça énerve de les voir agir comme ça, parce que ça rappelle des aspects peu glorieux de nous-même, ça nous (me?) renvoie à nos faiblesses. Mais même si je ne me suis pas attachée ni à Leonard, ni à Michelle, ni à Sandra, je les ai tous compris à un moment ou à un autre. Et même si je ne les avais pas compris, je sais que j'aurais pu les comprendre. Parce que le travail sur les personnages est absolument excellent. Et pour ne rien gâcher le jeu du trio de tête est irréprochable. Si pour Phoenix je ne suis pas étonnée, venant de Gwyneth Paltrow c'est une très bonne surprise car je la connaissais moins. Enfin, Two lovers ce n'est pas juste des personnages, c'est aussi une ambiance. C'est très noir, très désenchanté, et on a souvent le cœur serré parce qu'en fait il n'y a pas de suspense : on devine plus ou moins comment ça va se finir. Parler de la fin m'oblige indéniablement à parler de l'esthétique du film. L'image est splendide, elle est toujours là pour venir servir l'atmosphère. Les différents procédés utilisés, que ce soit le travelling ou la caméra à l'épaule, les gros plans ou les plans larges, ont tous l'air d'avoir un sens. James Gray s'est bien démerdé, parce que rien ne semble gratuit. Les contrastes sont superbes, beaucoup de scènes sont d'une beauté absolument décapante, comme la scène de la discussion entre les deux balcons. Mais celles qui me marqueront le plus, c'est cette scène incroyablement prenante où, à la fin du film, Gwyneth Paltrow passe sous le porche pour venir parler à Joaquin Phoenix dans la cour de l'immeuble. Rien qu'à la manière dont son arrivée est filmée, on sait ce qu'il va se passer et on est suspendu à l'écran : la forme et le fond s'entrelacent parfaitement. L'autre scène qui m'a marquée, c'est la toute fin du film...