Au risque d’en décevoir certains, je ne pense pas que ce soit le meilleur film d’Henri Verneuil. Pour ma part, je préfère largement "Mélodie en sous-sol", certes très différent. Cela dit, je ne dis pas qu’ "Un singe en hiver" n'est pas bon, non. Loin de là ! Evidemment, on peut compter sur le savoir-faire d’Henri Verneuil, lui qui nous a régalé déjà avec "La vache et le prisonnier". D’ailleurs, le point commun entre "La vache et le prisonnier" et "Un singe en hiver" est la simplicité du scénario.
On peut compter également sur le casting, puisque la tête d’affiche est partagée entre Jean Gabin et celui qu’il appellera Monsieur (le monde à l’envers), Jean-Paul Belmondo. Gabin laisse filer ce flegme qui fait son charisme pour nous jouer un numéro de personnage fortement alcoolisé en compagnie de son grand ami Paul Frankeur. 18 minutes de pur régal. Je ne reviendrai pas sur le synopsis proposé ici, je ne ferai que le répéter, peut-être plus en détail. Mais on reconnait bien l’insouciance de la jeunesse de Bébel qui va atterrir dans un hôtel peu avenant, tenu par un hôtelier peu avenant, par un temps peu avenant, à une heure peu avenante. Et c’est pourtant avec cette mixture peu avenante que va naître une amitié entre ces deux hommes, l’un alcoolique notoire pour oublier une histoire d’amour et pour voyager en Espagne, l’autre qui carbure à l’eau sèche comme un coup de trique pour ne plus voyager en Chine. Venu pour récupérer sa fille dans le pensionnat de Tigreville, le jeune Fouquet va rappeler la jeunesse à Albert, de la même façon que la sagesse d’Albert va déteindre sur le sens des responsabilités de Fouquet. Ce dernier étant chargé d’une mission, il n’en fallait pas plus pour pousser Albert à lui donner un coup de pouce en animant de façon incongrue la tranquille ville de Tigreville, scène qui termine le film en véritable feu d’artifice.
Ils sont rythmés par les dialogues de Michel Audiard, toujours aussi ciselés et taillés sur mesure, nous amenant une belle collection de répliques cultes. Un vrai régal pour nos esgourdes. Puis comme une fusée perdue, la dernière citation de Michel Audiard, « Et le vieil homme entra dans un long hiver… » sonne comme le glas d’une personne qui a décidé d’en finir, balayant d’un seul coup toute forme d’hilarité pour laisser place à une grave tristesse


en nous en le voyant attendre assis seul sur un quai de gare quasiment désert.


Adapté du roman éponyme d’Antoine Blondin, "Un singe en hiver" paraît être un titre à la fois répugnant et intrigant. L’explication du titre nous est donnée par Jean Gabin dans le film, mais sachez qu’il s’agit d’une belle histoire d’amitié entre deux hommes qui vont s’apporter mutuellement énormément de choses. Un film à découvrir ou à redécouvrir, ne serait-ce que pour les joutes verbales du maître incontesté des dialogues, j'ai nommé Michel Audiard.

Stephenballade
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le 22 mai 2020

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