Avec ce film, Claude Lelouch a sans doute signé sa plus belle réussite depuis Itinéraire d'un enfant gâté.
Il est de ceux qui ont un charme fou, dû en particulier à ses comédiens principaux, Jean Dujardin et Elsa Zylberstein.
L'histoire est du Lelouch pur jus, et familier de son univers ; un compositeur de musique de films va en Inde pour créer une version hindoue de Roméo & Juliette renommée ... Juliette & Roméo. A cette occasion, il va rencontrer l'ambassadeur français, et son épouse. Ce compositeur, incarné par Jean Dujardin, souffre de migraines récurrente et va, lors d'une pause lors de la création de sa musique, se balader dans le pays pour rencontrer une certaine Amma, accompagné de la femme de l'ambassadeur (Elsa Zylberstein) qui veut aller sur la route de la fertilité, car elle veut un enfant.
Le style Lelouch est toujours là, avec ces formidables moments d'improvisation, la musique de Francis Lai, et des acteurs en état de grâce. A travers ce film, on sent bien que Jean Dujardin marche sur les plates-bandes de son idole Jean-Paul Belmondo, en particulier à cause de Un homme qui me plait, déjà signé par Claude Lelouch en 1969. Quelque part, son look nous rappelle Belmondo, mais il faut dire que c'est la première fois que je le fois en tant qu'objet de séduction, alors qu'il ne cherche pas à draguer en Inde. Face à lui se tient une éblouissante Elsa Zylberstein, qui apparait totalement épanouie, et qui prend un plaisir manifeste à jouer avec Dujardin, dans des scènes qui sont pour beaucoup improvisées, en fonction de ce que les acteurs et l'équipe technique ont vu dans le pays.
Je parle en particulier de la scène dans le train, où chacun va prendre le rôle de l'autre par jeu, ou alors leur ballade près du Gange qui semble totalement naturelle, spontanée, et qui va aboutir à la baignade de Zylberstein, tout en priant le ciel pour qu'elle ait cet enfant tant désiré.
On y trouve également Christophe Lambert en ambassadeur et Alice Pol, qui joue la compagne de Dujardin venue le rejoindre en Inde. Si on peut regretter que les deux acteurs soient autant en retrait surtout la jeune femme, qui n'a pas grand chose à défendre, je suis content de voir Lambert dans un beau rôle. La scène du restaurant montre tout de même qu'il a l'étoffe d'un excellent acteur ; dommage qu'il ne l'a que trop rarement montré.
Bien entendu, le film se passant en Inde, on n'échappe pas au côté carte postale, mais par la façon dont Claude Lelouch filme ces foules immenses, de manière improvisée, mais avec un grand respect, nous somme nous aussi ébahis par ce que sa caméra capte, où la misère a l'air d'être présente à chaque instant. Mais quelque part, il ressort de ces gens une dignité, une croyance, jusqu'à la scène très touchante avec Amma, une figure spirituelle hindoue dont la mission est de serrer dans ses bras des milliers de personnes chaque jour afin de les guérir de leurs maux. On bien la surprise de Dujardin et Zylberstein à ce moment-là, et elle ne parait pas feinte ; le fameux instant de vérité tant déclamé par Lelouch...
D'ailleurs, il s'est calmé sur les aphorismes, pour une proposer au final une très belle histoire sur deux personnes dont tout les oppose (il est libre, elle est rigide, il est déconneur, elle est sérieuse...).
Lelouch est toujours en pleine possession de ses moyens, et cela fait grandement plaisir !