Si le film de Roland Joffe, La déchirure, n'avait pas connu un tel succès peut-être que Under fire serait resté un peu plus dans l'histoire. Je ne comprends pas comment ce film qui réunit Gene Hackman, Nick Nolte, Jean Louis Trintignant et Ed Harris, soit resté dans l'ombre et même dans l'inconnue la plus totale. Surtout quand Quentin Tarantino y fait référence dans Django (J'expliquerai cela plus tard). D'autant plus que la presse française a été assez élogieuse sur le film. La seule explication pour moi de cette absence de succès est que le film est assez critique des Etats-Unis alors qu'a cette période Reagan était au pouvoir.


L'histoire de ces photographes et reporters de guerre est passionnante. Dans Under fire, la guerre est perçue du point de vue des journalistes. Ils vont partout, interagissent avec tout le monde et finissent par nous donner une vision globale de la guerre entre rebelles et la dictature au Nicaragua. C'est ainsi qu'on croise un espion français, une miss Panama, un mercenaire américain, un dictateur, et de simples nicaraguayens qui tentent de survivre. Le tout capturé par Russel (Nick Nolte). Chaque personnage est intéressant et bien traité. Cependant le personnage interprété par Nick Nolte est celui qui bénéficie de la plus belle évolution. Normal vous allez me dire, c'est le personnage principal. Certes, mais malgré un développement attendu, l'évolution de Russel est beaucoup mieux géré par rapport à d'autres films. Le film nous fait prendre conscience du rôle plus ou moins important des reporters de guerre. Ici, chacun cherche le sens de ses actes. Pourquoi ces photos? Quelle est l'utilité de mes actions? Doit-on toujours utiliser son appareil pour la révolution ou pour la prise de conscience occidentale? Tous les autres journalistes sont passionnants à suivre. On peut même dire que tous les protagonistes de cette histoire sont incroyablement bien écrits. Et l'intrigue est très bien ficelé oscillant entre le drame et l'espionnage.


Bon si le scénario est une réussite, qu'est ce qui a empêché ce film de faire un carton? J'avoue ne pas avoir de réponses. Les acteurs sont tous très bons ce qui n'est pas surprenant quand on voit le casting monstrueux du film. Seule la mise en scène alors aurait pu enterrer ce film dans l'oubli. Et le problème est bien là je pense. La mise en scène est difficilement percevable. On voit alors un film sans esthétique particulière. C'est vrai les scènes d'action sont réussies mais alors pour le reste c'est d'une platitude extrême. Et pourtant des la première scène, la caméra adopte une distance par rapport à l'action. Bizarrement un peu à la manière d'un journaliste. Plus bizarre encore, lorsque Russel hésite à s'engager la distance se rapproche et s'éloigne. Et curieusement lorsque Russel fait un choix non plus de journaliste mais d'homme la caméra adopte une intimité avec ses acteurs qui réchauffe le film qui était jusque là glaçant. Roger Spottiswoode, le réalisateur, a su être très intelligent dans son montage et sa mise en scène. Il attache beaucoup de détail à l'environnement, aux différentes personnes dans le cadre. Totalement à la manière d'un photographe de guerre. Ses cadrages rappellent certaines photographies que l'ont peut voir dans les journaux. L'idée est très bonne mais insuffisante esthétiquement pour impressionner autant que d'autres films de ce genre. Les scènes d'action sont très bien rythmées et le montage est excellent. Pas étonnant lorsque l'on s'aperçoit que le réalisateur était le monteur des Chiens de paille et de Pat garret et Billy the kid, deux grands films de Sam Peckimpah. On s'aperçoit aussi qu'il a mis en scène A l'aube du sixième jour ainsi que Demain ne meurt jamais (James Bond).


Rappelez-vous qu'en début de critique je vous parlais de Tarantino qui fait référence à Under fire dans Django unchained. Et notre cher Quentin a peut-être piqué la chose la plus réussi du film qui est sa musique. Et oui, le cinéphile cale le thème intitulé Nicaragua d'Under fire. Une Bo incroyable signé Jerry Goldsmith. La scène où il décide de mettre cette musique est assez évocatrice du film dont elle est tiré. On l'entend lorsque Django arrive a Candieland , lorsqu'il entre dans cet enfer. Elle est quasiment utilisée de la même manière dans Under fire. C'est là que je réalise que Tarantino est un monstre de cinéphile.


Under fire est un film à voir. Un film qui décrit bien la guerre et ses acteurs. Un contexte où chaque engagement quelque soit le côté est toujours remis en cause. La tyranie, la presse, le jugement et l'impartialité sont traités avec une justesse et une absence de manichéisme rare pour ce type de production. Il y a tout pour faire un chef d'oeuvre mais le film ne pousse pas assez loin dans sa réalisation pour en faire partie. Un film à découvrir pour nous occidentaux bien à l'abri.

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le 6 avr. 2017

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