Sam, trentenaire vivant à travers ses fantasmes féminins et de célébrité, s’éprend d’une femme dont il ne connait rien. Celle-ci disparait soudainement et Sam décide de mener l’enquête…


Et si le monde entier était codé, et que les personnes que l’on connait ne sont pas celles que l’on pense ? Et que notre vie entière repose entièrement sur du fantasme ?


C’est la réflexion amenée par le réalisateur David Robert Mitchell dans ce polar qu’est Under The Silver Lake, après le succès de l’angoissant It Follows en 2014. Présenté en sélection officielle au Festival de Cannes, ce film est pour moi un réel succès. Et ce sur de nombreux points (on lui pardonnera volontiers le léger manque de cohérence du scénario, principalement sur le nombre de références filmiques).


L’histoire ne tient pourtant que sur quelques lignes, mais est emplie de détails fantastiques : dans ce film, nous suivons le trentenaire blasé Sam (Andrew Garfield), rempli de désir envers la jeune Sarah (Riley Keough, petite fille d’Elvis Presley !), au physique de poupée Barbie, que l’on rapproche de manière évidente à Marylin Monroe. Elle disparaît du jour au lendemain, en laissant de nombreux indices derrière elle, ce qui arrange bien Sam…


Des affiches de films aux objets, l’enquête est un véritable patchwork d’indices… et met en scène l’histoire du cinéma à travers eux. Du cinéma muet aux 70’s, les affiches servent autant d’indices que d’hommages cinématographiques. Overdose d’Hitchcock (on notera l’immense hommage à Fenêtre sur Cour dès l’ouverture), d’une mère fan de Janet Gaynor, et d’une pluie de références à la pop culture, le film retrace - un peu maladroitement - les icônes du cinéma américain. Ce que l’on sait (ou pensons savoir…), c’est que le célèbre Silver Lake a quelque chose à voir avec les disparitions dans la ville de Los Angeles.


On ne compte pas un personnage un tant soit peu loufoque dans ce film, et il nous est impossible de nous situer à une époque précise, seul les jours qui passent avant l’expulsion de Sam de son appartement (soit moins d’une semaine) nous rappelle à l’ordre.


On appréciera le décalage entre la modernité du film et la musique, composée par Disasterpeace, dont on se délecte tout au long du film, rappelant l’ambiance des polars et films noirs, et créant une ritournelle comme un cercle vicieux dans lequel Sam s’embourbe et manque de se noyer. Le film alterne entre des cadrages obsédants sur les visages des personnages, et des plans larges, presque cartographiques sur la ville de Los Angeles, de plus en plus angoissante.


Malgré sa durée (2h20), le film séduit par son esthétique colorée et sombre à la fois, un magnifique jeu d’acteur de la part d’Andrew Garfield. La violence physique et psychologique créé par l’entremêlement des événements est loin d’empêcher le spectateur de se plonger avec Sam dans sa quête d'amour et de vérité, et peut être par la même occasion, de sortir de son éternelle adolescence. Au-delà de son absurdité (et ce, du début à la fin), dont on ne peut saisir toutes les références, ce film utopique interroge et laisse perplexe quant à ce que nous pensons savoir des personnes qui nous entourent, et plus globalement, de la société dans laquelle nous vivons. On sortira alors du film triste du sort de Sam, avec une vision nouvelle et modernisée du polar, et l’on ne se lassera pas des musiques de ce film, dont on se replongera bien volontiers…


P.S : BEWARE THE DOG KILLER


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amelieodt
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le 12 août 2018

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amelieodt

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