Ce qu'on remarque rapidement avec ce film, c'est que Lynch en a manifestement marre des jeunes (après tout, c'est superficiel, ça râle tout le temps, ça pense qu'à ses petits états-d'âmes et en plus ça ne paye pas d'impôt.) Du coup, le réalisateur se met à filmer un vieux (je vais l'appeler "vieux" tout le long.) Il a quand même un regard bleu, des cheveux et une barbe argentée... Une photogénie qu'on dirait tout droit sortie d'une vielle pub western du Cowboy Marlboro.


L'histoire du film est simple. Le frère du vieux est malade. Il a eu une attaque. Ça fait quand même 10 ans qu'il ne se sont pas vus... Pour marquer le coup et renouer avec lui, celui-ci décide de traverser une partie de l'Amérique profonde en tondeuse à gazon.


Assez vite, cette tondeuse va tout simplement représenter la narration dans le cinéma : il faut que ça avance, même lentement, vers le prochain but, l'autre étape avant les retrouvailles finales. Et ça marche. Lentement mais surement, s'il y a de beaux paysages, du blé doré, quelques personnages égarés à remettre dans le sillon, de belles étoiles et une jolie musique folk aux synthés doux et mélancoliques, on attend la suite.


Après un couac en descente (qui donne lieu à la seule mais modeste scène d'action du film) le maestria vaut alors tout le chemin parcouru...


FIN


Le vieux arrive. L'émotion monte. Il y a comme un choc fraternel. Le silence dramatise la scène, la rend déterminante. On voit sortir d'une veille maison un acteur fétiche chez le réalisateur. Celui-ci est le frère malade. Autre silence. Les deux s'assoient... Le frère qui reçoit la visite regarde assez vaguement les alentours... Puis aperçoit la tondeuse. Il lui demande s'il a fait tout ce chemin avec ce "machin". Pendant ce temps, ses yeux baignent dans des petits croissant de larmes.
Le frère qui a fait le voyage regarde dans les airs.


La caméra monte.
On voit les étoiles.


Et là on se dit, "chef d’œuvre." Il n'en fallait pas plus et pas moins : une caméra qui filme des yeux en gros plan et des étoiles.


Un coup de génie, ça ne tient parfois pas à grand chose.

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le 8 sept. 2011

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Oka Liptus

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