Une Séparation c’est la sobriété au service d’une histoire et des ses acteurs, c’est la sobriété comme clé de la réussite d’un réalisateur pour transcender une histoire banalement dramatique et faire ressortir l’exceptionnel qui réside, malgré nous, dans des vies qui nous paraissent parfois bien fades. Certains parlerons d’austérité et n’adhérerons pas parce-que leur conception du cinéma n’est pas celle-là. Ils passeront à côté de la force et de l’ambivalence des sentiments, bons ou mauvais, qui se dégage d’un jeu d’acteurs d’une précision presque scientifique.
L’histoire est basique : un couple se sépare, leur fille doit faire un choix. Le père du mari, dépendant, nécessite l’embauche d’une garde-malade. Garde-malade enceinte qui se retrouve rapidement débordée par la tâche et abandonne un jour le vieil homme une partie de l’après-midi, attaché à son lit. A son retour, son employeur découvre son père et, de colère, bouscule cette femme qui fait une fausse-couche peu après. S’ensuit une difficile bataille judiciaire entre deux familles que tout oppose.
Si l’histoire et simple, elle prend une force insoupçonnée par l’insistance du film sur l’ambiguïté des sentiments et des émotions des personnages. Tout au long du film, on découvre peu à peu qui ment, sciemment ou par omission. On apprend que les mensonges sont utilisés pour servir les intérêts de chacun. Cette scène fabuleuse du père stupéfait quand sa fille lui prouve qu’elle a conscience qu’il a menti au juge qui l’a inculpé du meurtre du fœtus est magistrale de tension. Il se retrouve incapable de répondre à sa fille, que ce soit pour reconnaitre la vérité ou pour tenter un nouveau mensonge.
C’est presque à un débat sur la conception de chacun du mensonge qu’on nous invite, sur ses conséquences sur les êtres qui nous sont chers. Cette sobriété générale du film nous laisse concentrés sur de complexes et nombreuses questions. Hors de question ici de perturber le spectateur, il est et doit resté concentré sur l’intrigue. Il doit pouvoir, avant même la fin, commencer à réfléchir aux questions presque philosophiques qui sont soulevées. Cette sobriété va même jusqu’à une absence totale de bande-originale dont on ne se rend compte que par hasard, captivé que l’on est par les enjeux.
Alors merci de nous faire découvrir une société iranienne si proche et si éloignée de la nôtre.
Merci de donner tant de matière à réfléchir en même temps que d’émotions à vivre.
Merci de montrer que les gens normaux peuvent être exceptionnels.
Merci de nous tirer les larmes avec si peu d’effets.
Merci…
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