Pour Luc Besson, l'adaptation de la BD Valérian et Laureline est une chimère d'une bonne vingtaine d'années. Pourtant, le plus américain des réalisateurs français est un habitué des moyens hollywoodiens et acteurs bankables. Mais il faut croire que le projet dépassait cette fois sa simple bonne volonté s'il voulait faire justice à l'imagination fébrile de Mézières. Si la sortie d'Avatar a alors été le déclic d'une infinité de possibilités numériques pour Besson, le film de Cameron s'est également imposé comme un défi inégalable.
Et, huit ans plus tard, on ne peut qu'applaudir l'effort qui a été fourni pour mener à bien ce projet gargantuesque pour un studio indépendant, et français de surcroît. Au-delà de ce style pompier propre à Besson, de ses séquences théâtrales, à la limite du burlesque avec tous ces personnages hauts en couleurs, des longueurs excessives de certaines scènes et de la lourdeur du film par moment, ce Valérian Et La Cité Des Mille Planètes est avant tout une œuvre visuellement impressionnante, qui ne laisse pas indifférent. Une sorte de Cinquième Élément puissance mille qui s'impose rapidement comme le magnum opus de Besson, loin du nanar clamé à tout va.
Pour l'apprécier à sa juste valeur, il faudra toutefois s'attacher un minimum aux protagonistes, ce qui peut prendre un peu de temps vu le manque de charisme de DeHaan et la désinvolture agaçante de Delevingne ; c'est pourtant ce qui finira par faire le charme de ces deux personnages, quand bien même leur romance peine à convaincre. On note également l'apparition d'autres acteurs connus, Clive Owen, Alain Chabat, Ethan Hawke ou encore Rihanna, allant du caméo opportuniste à un rôle plus intéressant pour l'intrigue, même si celle-ci est surtout centrée sur les péripéties du duo principal.
Derrière des séquences ronflantes et putassières, à la limite du jeu vidéo par endroits, toute la retranscription de l’univers de la BD est une mine d'émerveillement, où les seules limites semblent être celles de notre imaginaire, cette fois. Le long-métrage fourmille de vies extraterrestres, de technologies SF en tout genre, d’environnements rétro-urbains et d'espaces naturels dépaysants aux couleurs somptueuses. Tous ces décors et ce bestiaire constituent la richesse visuelle spectaculaire du film ; de loin son meilleur atout. Par ailleurs, il est nécessaire de souligner le magnifique travail sur la 3D pour un voyage intersidéral qui ne cesse de ravir les pupilles à chaque instant. On peut toutefois regretter un manque d'exposition au profit de l'action et la volonté d'apporter constamment du neuf visuellement au spectateur.
Pourtant, ce Space Opera sensationnel a pour principal écueil d'avoir été réalisé trop tard, puisque de nombreux films de SF cultes se sont inspirés de la BD française pour leur direction artistique, ne permettant alors pas à cette adaptation filmique d'être qualifiée de visionnaire, ni de réellement surprendre dans ses designs. Certes, les maquillages sont des plus réussis, et les décors se succèdent sans que l'on ne sache plus où donner de la tête, dans un foutoir toujours plus cohérent que celui de Jupiter Ascending, mais on ne peut s'empêcher de retrouver du Blade Runner dans les villes, du Avatar pour les aliens écolos du film, ou bien du Star Wars et du Star Trek sur des vaisseaux, créatures et mêmes certaines scènes d'action. Heureusement, Besson parvient tout de même à digérer une grande partie de ces œuvres pour rester inventif, et surtout donner l'envie au spectateur de retourner arpenter cet univers et d'y vivre mille autres histoires.