Le nouveau film de Guillaume Nicloux a des allures de défi. Prenez deux des plus grandes figures du cinéma français, mettez-les dans un désert et voyez s’ils s’en sortent. Nicloux réunit 30 ans après Pialat Gérard Depardieu et Isabelle Huppert pour former un couple divorcé dont le fils récemment décédé leur promet de réapparaître s’ils suivent ses directives préalablement écrites dans une lettre. Le défunt leur somme de se rendre dans le cagnard désertique de la Vallée de la mort.
Nous sommes dans le film-concept le plus absolu, ces deux grands acteurs sont plongés dans un désert tout autant scénaristique que géographique. Assis sur leur chaise, les deux personnages guettent chaque jour désespérément que quelque chose se passe, une attente qui délie les langues. Le spectateur se rend vite compte qu’il n’a rien à attendre de ce scénario pseudo-fantastique et prend plaisir à voir se mouvoir le ventre proéminent de Depardieu. Si énorme, dans tous les sens du terme, qu’il en finit par éclipser Isabelle Huppert, faut le faire !
Avant d’être l’histoire d’un couple en deuil ou d’un amour qui renait de ses cendres, Valley of Love est avant tout un film sur l’homme Depardieu. Lorsqu’on en vient à confondre l’acteur et le personnage, on entre dans le mythe. Depardieu ne jouera jamais rien d’autre que le rôle de… Depardieu. Le moindre petit grognement ou trait d’humour de l’acteur fait sourire, chaque apparition de son corps volumineux engendre le plaisir non-dissimulé du spectateur et Guillaume Nicloux l’a bien compris. Le réalisateur se contente de nous plonger dans l’atmosphère fantasmagorique et caniculaire de la Vallée de la mort, et ça fonctionne étonnement bien.
Qu’aurait donné Valley of Love sans Depardieu ? Le vide le plus complet. Un néant que seul l’acteur castelroussin suffit à remplir avec son imposante carcasse. Pari réussi pour Guillaume Nicloux qui se voit offrir sa première sélection en compétition cannoise.