Vice-versa
7.5
Vice-versa

Long-métrage d'animation de Pete Docter et Ronnie del Carmen (2015)

On voulait le voir. C'était sur, on n'allait pas manquer sa sortie. Fin d'année scolaire, flemme, je ne sais plus : on a raté la séance. On se promet, la semaine prochaine on y va ! La semaine passe. On va faire du vélo ou se balader... je ne sais plus... On oublie. Puis on repasse devant le cinéma : on se jure d'y aller le mercredi suivant. Quelle occupation hautement absorbante nous a détourné ? Au final on l'a encore manqué.


Voilà comment nous sommes passés à côté de ce "Vice Versa" pendant des semaines, puis des mois. Et le week-end dernier, enfin, nous voilà confortablement installés pour voir la nouveauté de Pixar. Mais les derniers films d'animations que j'avais vu avec ma fille, ne m'avaient pas laissé un souvenir impérissable. Et je m'apprêtais mentalement à prendre sur moi, pour qu'elle ne soit pas atteinte par un effet de contagion par mon ennui pré-programmé.



Who's the boss ?



Le film commence. Nous ouvrons les yeux et nous voyons le monde de Riley par les yeux de Riley. Embarqués illégalement dans son lobe frontal, nous voilà au coeur du poste de commande aux côtés des cinq émotions primaires. D'après les auteurs de "Vice Versa", la Joie est l'émotion dominante chez le nouveau né et le jeune enfant. C'est un peu elle la boss dans ce bazar qu'est la petite enfance à peine émaillée par quelques interventions mineurs de Dégoût, Peur, Colère et Tristesse.



Bonjour Tristesse



L'enfance passe (trop vite) et Riley a onze ans. Pré-pubère, déracinée du confort de sa maison tranquille par un déménagement qui la conduit à San Francisco, la toute jeune ado va voir sa paisible routine s'effondrer (en même temps que les îles métaphoriques de sa personnalité dans son cerveau). L'insécurité s'installe. Joie et Tristesse quittent le poste de commande en urgence pour récupérer de très précieux souvenirs perdus dans les dédales interminables des lobes pariétaux et temporaux.


Ainsi commence pour Riley le règne de Dégoût, Peur et Colère. (Ahh, l'adolescence....).



Pixar : le studios des rêves



Sur un schéma bien huilé à la manière de ses anciens blockbusters, Pixar réussi à faire de "Vice Versa" un super moment à partager en famille mêlant humour et émotions. Intelligent, narativement bien mené, ce film pour enfants est une jolie exception dans le panorama de la concurrence. Bien sur, votre enfant ne ressortira pas de la séance avec un diplôme de psychologie en poche, sachant disserter sur l'avancée des neurosciences cognitives de l'émotion d'une main et ramenant un 10/10 en math de l'autre.


Mais en passant par les "studios des rêves", le "train de la pensée" et en traversant le "pays de l'imaginaire", le jeune spectateur aura entendu que l'émotion, qu'elle soit positive ou négative, est l'un des ciments qui lui permet de construire (les îles de) sa personnalité. Il aura constaté que plus il grandit plus sa palette émotionnelle va s'élargir, que de ses 5 émotions de base combinées il en jaillira de nouvelles en demi-teintes. Et que chacune d'entre elles sera aussi importante qu'un trésor de guerre (celle de la vie, ce vaste chantier, qui s'ouvre devant lui)


Il découvrira aussi, grâce aux quelques scènes où on transite dans le cerveau des autres personnages, la notion d'altérité. Si lui doit, à chaque instant, faire face à ses émotions, les entendre et les décoder, sans se laisser dominer par elles, l'autre est lui aussi dans la nécessité de tamiser les siennes pour une relation pacifiée.



Que se passe-t-il dans la tête des chats ?



Au final, je n'ai pas eu le temps de m'ennuyer. Ca faisait longtemps que ça ne m'était pas arrivé devant une animation. Et, après le film, nous avons eu ma fille et moi une longue conversation sur les émotions, l'adolescence, la différence entre émotion et sentiment, les déménagements, les rêves, ce qui se passe dans la tête des chats, etc. Et comme elle à 9 ans et demi, je sens que ce n'est pas la dernière du genre. Pixar, cette fabrique d'émotions, aura réussi avec ce film pour enfants, à créer une oeuvre qui donne envie de parler, d'échanger et de s'interroger un fois la projection terminée.


Alors quel que soit votre age, que vous ayez des enfants ou pas, n'hésitez pas à voir ce film. Adulte, nous avons souvent appris à nous méfier de nos émotions pour laisser une place plus (trop?) grande à la raison. Ce petit film métaphorique vous donnera envie de vous réconcilier avec elles. Même si elles ont l'art de nous chambouler, elles savent aussi nous rendre si vivant... ou presque.

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le 28 oct. 2015

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