La com’ de film allemand l’aura allégrement martelé : il n’est constitué que d’un unique plan-séquence. Entre le premier « Action ! » et le dénouement deux heures et quart plus tard, ni coupure ni respiration. L’exploit impressionne mais omet de dribbler les longueurs. La cabale improvisée chahute les personnages dans Berlin et, forcément, impose ses trajets en temps réel. On pardonne ce revers de la médaille tant il permet une identification soudée. L’on accompagne ces fêtards allemands, des mouches îvres rêvant de butiner la ravissante Espagnole échouée, avec une solide authenticité.
Le montage final a retenu la troisième prise, qui comporte son lot de balbutiements. L’imperfection devient régalante pour narrer cette virée dégingandée. Ses dialogues fleurent les rencontres impromptues dans un anglais alcoolisé. Les accents tourbillonnent entre deux typhons vertigineux. On pense à Cours, Lola, Cours, autre perle germanique contre-la-montre. Ou, lorsque la déshérence razzie l’insouciance nocturne, à Ni pour, ni contre, bien au contraire. Dans la détresse de ses figures désorientées, Victoria en vient à bâtir sa propre identité. Et dépasse son gimmick de tournage, qui aurait pu l’avaler tout crû.