Alors que les mises en examens et les arrestations pleuvent sur les notables français,un groupe de politiciens et d'affairistes redoutant d'être dans le collimateur de la justice font appel à leur complice Castellin,une éminence grise mi-businessman mi-truand,afin qu'il règle le problème.Le gars s'arrange pour qu'on refile les dossiers chauds à une jeune juge d'instruction provinciale,pensant qu'elle sera facile à manipuler.Mais c'est le contraire qui se produit car la fille se révèle inflexible et incorruptible.En ces nineties finissantes,Jean-Pierre Mocky était déjà bien dans le potage et oeuvrait dans le petit budget,multipliant les postes afin de faire des économies.C'est le cas sur "Vidange" dont il est réalisateur,scénariste,monteur et acteur principal.Il travaille avec des collaborateurs habituels tels que le chef-opérateur Edmond Richard et son assistant Michel Gallois,qui signent une image sans grand relief,l'adaptateur André Ruellan,le musicien Eric de Marsan,qui a composé une sorte de ritournelle pour boîte à musique assez pénible,et la bande d'acteurs à trognes bizarres squattant traditionnellement les mockeries.Pour autant le film n'est pas si mal et même plutôt supérieur à de nombreux opus de JPM.Certes il charrie son lot de scènes maladroitement agencées,d'exagérations,de comédiens approximatifs,de confusion narrative et de moralisme naïf mais cette dénonciation de la corruption des élites fonctionne pourtant correctement.On le doit en partie aux dialogues de l'écrivain Michel Grisolia,auteur de "L'inspecteur de la mer",le roman qui avait inspiré "Flic ou voyou",qui s'avèrent souvent brillants et riches en répliques assassines quoique parfois verbeux.Mocky fait ici preuve d'une certaine maîtrise scénaristique et son récit tient à peu près la route même s'il a tendance à accumuler trop d'éléments et à tout mélanger,de la vénalité politique aux magouilles patronales en passant par la pédophilie des élites ou la prostitution des jeunes filles russes.Tout ceci n'est pas forcément sans rapport mais les liens établis par JP sont passablement brouillons et du coup peu convaincants.La bonne nouvelle est que contrairement à la coutume,il prend du recul et fait la part des choses,démontrant opportunément que les mis en cause,aussi pourris soient-ils,ne sont que des marionnettes au service d'intérêts qui les dépassent et font office d'hommes de paille de toutes les mafias de la Terre qui dirigent le Monde en sous-main.Par conséquent,l'action d'une Justice efficace,fût-elle féroce,ne s'applique qu'à la partie visible de l'iceberg et ne s'étend jamais aux tireurs de ficelles.D'ailleurs Mocky met aussi en cause les méthodes de la juge qui,grisée par sa croisade,se livre elle-même à des manoeuvres illégales,ce qui provoquera sa chute.Il ressort au fond de tout ça que la pureté absolue n'est qu'un fantasme et que l'Homme,pour peu qu'il ait l'occasion de détenir un pouvoir quelconque et d'y trouver une gratification financière,finira toujours par en abuser.Cette amertume est du reste celle qui anime le personnage de Castellin,un vétéran de tous les coups tordus qui cherche en bout de course à se racheter partiellement,encouragé en cela par la surprenante histoire d'amour qu'il vit avec la magistrate qu'il éveille à la sensualité.Mocky,qui pour une fois ne s'est pas donné le beau rôle,du moins pas tout-à-fait,est excellent en tripatouilleur repentant alors que la divine Marianne Basler,bien qu'un peu âgée pour le rôle,37 ans à l'époque,réussit une belle composition en faisant évoluer son personnage tout au long du film,et en plus elle est canon.La bande des gueules de carnaval estampillés JPM a semble-t-il été pour une fois bien dirigée et les performances de ces seconds couteaux sont pour la plupart très bonnes.Michel Bertay est comme d'hab l'incarnation parfaite du notable hautain,arrogant et carnassier,Jacques Legras surprend en procureur pédophile,tout comme Dominique Zardi en juge incarcéré et apeuré,Alain Fourès est à l'aise en âme damnée de Castellin et Jean Barney inquiétant à souhait en mafieux jovial.Il y a aussi Jean Abeillé en ripou des affaires,Henri Attal en brocanteur pas net,la gargouille Evelyne Harter en greffière faux-jeton,Christian Chauvaud en inspecteur de police,Roger Knobelspiess en intervieweur télé et Olivier Achard et Michel Stobac en enfoirés en costards.

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le 24 nov. 2020

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