Ça faisait longtemps que je voulais le revoir. C'est l'un des films qui a déclenché ma passion pour le cinéma. Je l'ai vu une fois enfant, puis je ne l'ai plus revu, si bien que je ne savais plus trop aujourd'hui l'état de ma relation avec ce film.
Vol au-dessus d'un nid de coucou est un chef-d'oeuvre, l'un des films les plus dignes et humain jamais réalisé. Sublime est cette attention de Forman pour les visages, ce qui les traverse, ce qui les habite. Plus encore : ce qui lie ces différents visages, comment ils forment un groupe, comment s'assembler est toujours une façon de résister. Le cinéaste trouve une manière de parler du collectif tout en faisant éclater chaque individualité. Tout le monde existe, tout le monde est drôle, existant, regardé. Et le visage est comme cet extérieur qui manque au film : tous les vents, les souffles, les oiseaux, les climats ont le temps de passer au dessus d'eux.
Plus passionnant encore est la façon dont Milos Forman investit Hollywood de ses ambitions retorses et subversives. Le mélange des deux ne crée rien d'autre que de la simplicité. Le film coule de source, nous bouleverse progressivement, jusqu'à l'épilogue droit dans la fenêtre brisée. Ce qui s'y dit est d'une profondeur et d'une beauté totale : la mort n'y est pas vu comme un renoncement, mais comme un acte de résistance, le dernier ; une possibilité de fuite vers un ailleurs plus beau, plus digne, enfin livré à la tranquillité de l'éternité. Et cette dernière image de course dans la forêt lointaine est la matérialisation étonnante de ce propos. Forman ose cela, ouvrir ce film qu'il n'a jamais laissé totalement clos : dire qu'il faut être mort pour retourner dehors.