Voyage au bout de l'enfer par Francis Janvier

Voyage au bout de l'enfer, malgré sa longueur, est une oeuvre passionnante qui traite avec brio des ravages que peut causer la guerre sur la psyché humaine. Ça commence dans la banalité, la futilité ; un mariage, des virées entre mecs, une partie de chasse, de la franche rigolade. C'est à peine intéressant, mais il y a ces trois personnages, ces trois hommes appelés au combat, qui se détachent du lot : Michael, Nick et Steven. Et puis on est balancés au cœur du Viêt-Nam, les trois américains ont été faits captifs et doivent supporter une torture psychologique effroyable : la roulette russe. S'ensuit une longue scène qui joue avec les nerfs du spectateur, et visiblement ceux des acteurs aussi, dont la performance brillante capture avec intensité la peur qu'il peut se dégager d'une telle situation. Ils finissent par s'en sortir, marqués au fer rouge par tant d'horreur, changés à jamais. Le film pose une question fondamentale ensuite : comment fait-on, après avoir vécu la guerre dans ses plus atroces itérations, revenir à la vie normale ? Retourner à la banalité, la futilité ? Le personnage de De Niro y répond en partie, incapable de se départir de son uniforme et incapable de traiter à nouveau les armes à feu avec autant de légèreté, de supporter que le personnage de John Cazale pointe son flingue à la gueule du premier qui l'emmerde parce qu'il ne sait pas ce que c'est que de craindre réellement une balle dans la tête. Un film essentiel, quoiqu'un peu long.