Voyage au centre d'un navet

Erik Brevig est à l’origine un superviseur d’effets spéciaux, qui a travaillé sur tout un tas de super films, comme Abyss, Total Recall… il a même été assistant réalisateur sur le cultissime Men In Black, entre autres : il a un background solide. C’est donc dans les années 2000 qu’assez logiquement il se lance dans la réalisation d’un film centré sur le grand spectacle, utilisant même en avant première la technologie 3D développée par James Cameron pour Avatar (2009). Voyage au Centre de la Terre 3D sort donc en 2008. Soit 15 ans après Jurassic Park.

C’est une bouse innommable. Et pourtant, je n’en attendais absolument rien.

C’est dingue même, de voir que le film se plante sur tous les plans, en lisant le CV de Brevig. Car le premier aspect qui ne fonctionne pas, c’est la 3D et les effets spéciaux. Les mauvaises langues diront que j’ai vu le film en 2D sur Netflix, sans même savoir au début qu’il était sorti en 3D (le suffixe 3D ayant été retiré du titre). Soit. Mais on repère tout de suite des plans étranges, “awkwards”, pas naturels du tout —avec un Fraser qui nous crache littéralement dessus, présageant de la suite du film—. Et c’est là qu’on comprend : c’est parce que c’est sensé être vu en 3D… Mais c’est de la 3D pour de la 3D, qui n’apporte rien au film. Ça ne rend pas l’action plus spectaculaire, c’est juste une excuse pour nous lancer des trucs à la figure. À l'inverse, regardez Avatar en 2D, ça reste un beau film.
Quant aux effets spéciaux eux-mêmes, ils sont à vomir. Jurassic Park faisait mieux. Les décors font soit studio bas de gamme, soit numérique encore plus bas de gamme. C’est souvent masqué par l’utilisation d’une faible profondeur de champ, ce qui floute l’arrière plan. Mais du coup ça sort complètement les personnages de leur environnement, renforçant d’autant plus l’aspect “filmé en studio”.

Note au passage : 45 millions de dollars de budget. Ça peut paraitre faible au regard de certaines productions monstres, mais ça reste un sacré paquet de blé, loin d’une série B. Besson a tourné Lucy pour cinq millions de moins. La 3D aurait-elle tout vampirisé ?

Le reste de la réalisation est digne d’une mauvaise sitcom, avec un éclairage complètement aux fraises, que ce soit de nuit ou en sous sol, on voit presque les grands spots éclairer les acteurs tellement c’est évident.

Parlons des acteurs, justement. Fraser fait du Fraser, c’est à dire qu’il est mauvais mais sympathique et qu’il croise les doigts pour que le film arrive à le rendre drôle comme dans La Momie. Mais là, c’est raté. Anita Briem est une potiche, Josh Hutcherson encore gamin n’est pas mauvais mais quand même fade.

Côté scénario, ce n’est guère mieux. Le livre de Jules Vernes est l’un de mes grands favoris, mais j’étais ouvert à ce qu’ils crééent leur propre variation de l'histoire. Pas un problème que ça se passe de nos jours, que ce soit une comédie grand public, que ce soient des Américains, ou même que le livre existe. Mais là, alors que les prémisses sont sensiblement les mêmes —un scientifique, son neveu et leur guide cherchent le centre de la Terre sur les traces d’un autre scientifique— le livre est constamment référencé, ce qui donne un côté méta très bizarre qui nous fait sortir du film en permanence : “Regardez, ça c’est comme le bouquin ! Regardez, ça c’est pas comme le bouquin !”
Et bien sûr, je ne mentionne pas les incohérences de l’histoire ou les personnages complètement clichés. Les dialogues sont également mauvais, ne parvenant jamais à sembler naturels.

C’est bien ça qui décrit le film, d’ailleurs. Rien ne semble naturel. Ni les dialogues, ni le scénario bizarrement méta, ni le jeu d’acteur, ni l’éclairage, ni la réalisation… Ni, bien sûr, les effets spéciaux. Du coup, au niveau des réactions du spectateur, chez moi rien ne marche, ni l’humour, ni l’émotion, ni l’émerveillement, ni le frisson… On n’y croit pas.

Bref, Voyage au Centre de la Terre (3D) est un film à enterrer à tout jamais. Mal écrit, mal réalisé, mal joué, avec des effets spéciaux ignobles : un gâchis de temps et d’argent.