Wallace et Gromit, c'est l'oeuvre de toute une vie pour Nick Park. Et pourtant, malgré le tandem plutôt efficace, jamais l'univers de W & G, inventés dans les années 80, ne m'avait paru plus douteux.

Park avoue s'être inspiré de son père pour créer le personnage de Wallace. Ce qui expliquerait que ce maître-inventeur, tour à tour, irresponsable et maladroit, soit zoophile. Un aveu puisqu'une l'une des scènes finales fait que Wallace se retrouve nu avec un Gromit très ému dans ses bras après que ce dernier se soit pris une carotte dans l'arrière-train (de son avion). J'ai toujours eu des doutes sur Wallace très sincèrement. Ce garçon seul dans la vie, toujours revêtu de son pull vert épinard sans manche, avec son chien d'aveugle. Une vie routinière, millimétré. Non mais Wallace souffre-t-il du syndrome d'Asperger ou bien est-il un castré chimique, avec un bracelet électronique qui expliquerait qu'il reste à domicile la plupart du temps ? De là, à résister au charme de celle qui l'aime et l'aime aussi ! Quand même !
Moi, je vous le dis, Wallace, ce Mr. Bean doublé d'un Inspecteur Gadget, oui Wallace est hyper louche.

Il n'y a pas que Wallace qui soit louche. Il y a tout le village qui est louche. Gromit, au milieu de tout ça, apparaît comme le plus sain d'esprit. Qu'est-ce qui anime ce village au fond ? On croirait que toutes les âmes de ce village sont tous des militants de la féodalité, de Nicolas Nihous et Christine Boutin ! La place de la tradition, du souvenir, le poids mémoriel joue un grand rôle figeant toute cette vie rurale. Rurale ? Oui, ils ont tous un lopin de terre où faire pousser des légumes bio. Des cultivateurs réac'. Voilà ce dont ils ont l'air. Une vie rythmée par des figures locales et seigneuriales : une baronne bobo excentrique et un Lord calculateur, phallocrate, snob, grand propriétaire terrien, chasseur et naturellement richissime.

Toute cette atmosphère n'est rien sans l'histoire en elle-même. Une espèce de Lapin-Garou géant menace la bonne tenue d'un concours ancestral de légumes. Pour remédier à la situation de crise, tous les lapins deviennent des boucs-émissaires en puissance. Et Wallace est chargé à une authentique épuration. Il déporte tous les lapins pour les emmener dans des camps cachés dans sa cave. Oui, je le proclame haut et fort : Wallace est un zoophile nazi. A cela s'ajoute un sentiment d'impuissance dans la communauté et organise une véritable jacquerie, une chasse aux sorcières pour traquer le Lapin-Garou, coupable de tous les maux. Le fatalisme mêlé à l'ardente croyance religieuse font de ce village un cauchemar en puissance pour quiconque, comme Gromit, est sain d'esprit.

Non mais quelle morale ! Mais heureusement l'histoire est très divertissante. Elle est faite de gags traditionnels, d'effets de surprise, qui vont crescendo, même dans les moments un peu plus lents. Le mot aventure ou le mot péripéties prennent ici tous leur sens. Vient en contrepoint, comme pour contrebalancer l'ambiance plus que... malsaine de ce village et de ses habitants, une dérision de tous les instants. Une dérision salvatrice, infiniment drôle et cartoonesque.

Heureusement que Gromit est là.

N.B. : Si je me moque autant de ce film, c'est parce qu'il faut savoir quelle est la filiation de l'humour de Wallace & Gromit. Nick Park est engagé par les studios Aardman. Les fondateurs de ces studios dont Peter Lord sont fortement marqués par l'humour et les productions des studios Ealing qui, sous les rôles et le talent d'Alec Guiness, ont créé un genre nouveau. Ce n'est pas pour rien que dans Fantastic Mr. Fox, on entend un bruit typique apparu dans "L'homme au complet blanc" - Anderson fait un clin d'oeil à ces prédecesseurs. Mais avec cet opus de W & G, c'est un autre son de cloche : on est bien loin de la satire, de la subversion, de la noirceur. Nick Park aurait-il oublié ce qui faisait l'existence de ses propres personnages ? Oh que non ! Il a juste cherché de nouveaux marchés avec un brin de démagogie et d'ouverture...
- ce qui explique le ton de cette critique à ne pas prendre au sérieux tout en la prenant suffisamment au sérieux.
Andy-Capet
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le 4 déc. 2012

Modifiée

le 3 janv. 2013

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Andy Capet

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