Le film qu'Alan Moore devrait enfin accepter de regarder

Entendons-nous bien, Watchmen n’est pas un chef d’œuvre, et ne devrait même pas être un chef-d’œuvre du cinéma super-héroïque, parce que malgré ses qualités éminentes, la technique et le rythme sont inégaux, quelques scènes d’assez mauvais goût, et la portée générale de la réflexion atténuée, notamment à cause de l’héroïsme des super-héros. Il n’en est cependant pas si loin, non seulement parce que l’on n’avait jamais vu un véritable amateur de comics se dédier avec tant d’acharnement sincère à un travail de cette ampleur – et rarement un adaptateur faire à ce point l’effort d’être fidèle à sa source – mais aussi en raison de son casting remarquable, de son esthétique globalement inspirée, de son intelligence structurelle et dramatique. Watchmen devrait à ce titre servir de standard, d’acquis, de base sûre, à l’industrie du super-héros, qui donne cependant l’impression de l’ignorer aussi bien qu’elle avait ignoré le comics qu’il adaptait.


L'intégralité de ma critique ici : http://vonguru.fr/2016/03/31/chefs-doeuvre-super-heroiques-watchmen-de-zack-snyder/


J'ai également consacré une analyse au générique du film (http://vonguru.fr/2016/10/22/ddd4-generique-watchmen-bob-dylan/) dont voici un extrait :


Le problème des Watchmen, posé dès la générique, est qu’ils n’ont aucune cohésion, qu’ils ne se surveillent même pas les uns les autres, et que le gouvernement seul a un œil sur leur groupe. Quand le poète Juvénal posait la question « Quis costodiet ipsos custodes ? » (Qui surveille ces gardiens ?), il faisait référence aux gardiens engagés par les propriétaires en leur absence, entre les mains desquels on plaçait donc beaucoup de pouvoir sans aucune garantie qu’ils n’en abuseraient pas. Le problème de Juvénal, c’est que le propriétaire ne puisse surveiller les gardiens pour protéger ses biens. Or, le propriétaire n’est pas le gouvernement (qui serait plutôt dans l’histoire le directeur de l’agence de sécurité recrutant les gardiens), mais le peuple, qui accorde sa confiance au gouvernement, et conséquemment à la police, pour le protéger.La question de Juvénal est donc centrale dans Watchmen parce qu’elle rappelle que le lien entre le super-héros et le peuple est indispensable à sa légitimité, et que dans l’absence de ce lien, il ne peut guère être que l’agent fasciste d’un pouvoir qu’il défend sans recul. L’usage de la chanson « The Times they are a-changin’ » n’était donc ironique que pour mieux rejoindre par d’autres biais la pensée de Dylan, perpétuel insurgé contre le système et ses agents « de l’ordre » (cf. « Desolation Row » entre autres).

XipeTotec
8
Écrit par

Créée

le 23 août 2017

Critique lue 146 fois

XipeTotec

Écrit par

Critique lue 146 fois

D'autres avis sur Watchmen - Les Gardiens

Watchmen - Les Gardiens
DocteurZoidberg
2

Ce matin, chien crevé sur mon écran.

Au moment où les geeks du monde entier étaient encore nombreux à avoir des ampoules aux mains après s'être astiqué la nouille devant le Batman über troublé...

le 21 oct. 2010

101 j'aime

43

Watchmen - Les Gardiens
Sergent_Pepper
8

En entrant ici-bas tout espoir abandonne : Chanson de geste

[Version vue : Ultimate Cut] Toi qui des héros le vibrant panache escompte En entrant ici-bas tout espoir abandonne Car de la grande Histoire, on a changé la donne Ce soir « It’s murder time » et on...

le 8 nov. 2014

78 j'aime

5

Watchmen - Les Gardiens
Eren
10

Zack à merde, c'est une insulte ? *

Le genre d'ambiance à la Nolan où on préfère montrer des mecs qui souffrent intérieurement et qui se lamentent pendant la moitié du film... Ce genre d'ambiance fait beaucoup de mal sur la perception...

Par

le 21 août 2014

78 j'aime

15

Du même critique

Le Retour de Mary Poppins
XipeTotec
4

Vive le capital !

Le Retour de Mary Poppins est oubliable, ou pis qu'oubliable : on aimerait l'oublier, et on sait que certaines scènes nous resteront en travers de la gorge, comme cette suffragette absolument ravie...

le 23 déc. 2018

5 j'aime

5

Illang : La Brigade des loups
XipeTotec
4

Bien pire qu'un vrai remake scène par scène

Parmi les trois « Netflix Originals » du mois d’octobre, Apostle était entièrement original, le scénario d’Un 22 juillet était écrit par Paul Greengrass, mais s’appuyait sur un livre de non-fiction...

le 1 nov. 2018

5 j'aime

Escort Boys
XipeTotec
8

Critique de Escort Boys par XipeTotec

Quelle étonnante surprise que cette série que j'aurais aisément pu croire états-unienne sans la langue et quelques actrices connues dans des rôles discrets, tant la Camargue rurale y est filmée comme...

le 26 déc. 2023

4 j'aime