Presque dix ans après l'auréolé Les Bêtes du Sud Sauvage, Benh Zeitlin revient avec un projet de longue date, une adaptation moderne et déchirée de Peter Pan. Toujours filmé avec le réalisme qu'on lui connait, le metteur en scène américain nous livre une vision tout à fait surprenante de la pièce imaginée par J.M. Barrie : la jeune Wendy et ses deux frères jumeaux James et Douglas s'évadent de leur piteuse maison pour rejoindre Peter, un gamin aventurier qui les entraîne dans une île volcanique où l'on ne grandit apparemment jamais si l'on continue de croire en la "Mère", une force spirituelle. Si l'on arrête d'y croire, on vieillit, on devient un paria exclu de la bande à Peter, ces enfants éloignés de chez eux, ces enfants perdus.


Certains aspects de l'adaptation semblent faciles, presque grossiers, et l'on se retrouve aisément dans la retranscription moderne de Zeitlin. D'autres sont en revanche beaucoup plus nuancés, plus tristes, plus violents, inédits même, le côté conte de fée n'étant pas du tout de mise ici. En lieu et place, le réalisateur nous propulse dans les merveilleux décors naturels des Caraïbes avec pour compagnie une bande de gamins débutants. Et c'est là le principal pour ne pas dire unique défaut de Wendy : s'ils restent convaincants, la myriade d'enfants peuplant le film ne transcendent jamais, la faute à une interprétation manquant parfois de conviction mais surtout une certaine insuffisance dans la mise en scène, Zeitlin n'arrivant pas à faire concrètement ressortir ses protagonistes et à les rendre pleinement attachants.


On ne sera donc pas subjugués par ces jeunes talents, eux qui tiennent le film sur leurs petites épaules, et on préférera se rattraper sur l'incroyable musique de Dan Romer et Zeitlin, à la fois enivrante, mélancolique et dynamique, véritable point fort du film qui sied à merveille une poignée de séquences aux airs de bonbons pour les rétines, la plongée sous-marine aux côtés de la baleine notamment. Poétique, sinistre et enjoué, mêlant simplicité et scènes à CGI réussis (très discrètes, on n'est pas dans un blockbuster de chez Warner Bros.), Wendy passe de peu à côté du statut de chef-d’œuvre mais n'en demeure pas un film singulier et attendrissant pour les grands enfants que nous sommes.

MalevolentReviews
7

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le 18 avr. 2020

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