Harrison Ford et les 80's, tout un programme... Alors qu'il vient d'enquiller en cinq ans deux Star Wars, deux Indiana Jones et Blade Runner, le bonhomme est au sommet de sa gloire et de sa mâle beauté.
A l'époque particulièrement à l'affût de projets originaux entre deux ou trois blockbusters, comme le montrait justement son implication dans le projet de Ridley Scott, Harrison accepte avec plaisir un projet particulièrement improbable de polar chez les Amishs que Cronenberg devait faire avec Stallone... Alors normalement, si vous comprenez de quoi je parle avec le terme Amish, c'est probablement à cause du film. Avant 1985, la quasi-totalité de la population ignorait jusqu'à l'existence de ces sous-mormons bataves qui s'efforcent en plein vingtième siècle de vivre à l'ancienne mode, sans machines, téléphone, voiture, télévision et surtout, sans le moindre bouton sur leurs vêtements...
Pour l'occasion Peter Weir quitte son Australie natale et démarre ce qui sera une carrière hollywoodienne honorable malgré son inconstance. Dès le début, le film assume son vrai sujet et ne propose l'intrigue policière que comme vague prétexte, ce qui intéresse ici, c'est la rencontre entre le bon flic de Philadelphie et cette étrange peuplade de non-violents anachroniques. Dans son rôle, Harrison fait merveille, beau comme un dieu grec, il parvient à être irrésistible même déguisé en Charles Ingalls, et on comprend très bien ce qui perturbe Kelly McGillis dans ce viril bonhomme qui s'offre en plus le luxe d'une petite blessure pour parachever son pouvoir de séduction... Comme un poisson dans l'eau face à une grange à monter à la main, l'ancien charpentier use et abuse de tout son potentiel pour rendre le reste du casting anecdotique. Pourtant, pour une fois, Danny Glover joue le méchant, Lukas Haas un gamin supportable pas trop bavard, Alexander Godunov essaie de cacher son visage de psychopathe et Viggo Mortensen y fait sa toute première apparition.
Bien sûr, si le côté vie primitive chez des bouseux fanatiques qui préfèrent la carriole aux automobiles me parle tout particulièrement, je peux comprendre que ça laisse froid. La musique de Maurice Jarre pousse un peu trop loin le bouchon et la photographie n'est pas des plus mémorables, mais on s'en fiche pas mal, c'est rare un film qui propose de découvrir quelque chose de tout à fait original et qui le fait très bien. Moi, de toutes façons, je ne m'en lasse pas (vous ai-je déjà indiqué que Harrison Ford y était tout particulièrement mis en valeur ?).
Après l'incroyable succès public et critique de ce film, qui lui valent un passage remarqué aux oscars et l'unique nomination du menton balafré le plus célèbre du cinéma, le réalisateur et la star en remettront une couche l'année suivante, avec le mésestimé Mosquito Coast où, cette fois, l'histoire de cet inventeur misanthrope au bord de la folie qui fuit le monde dit civilisé n'aura même pas besoin du prétexte policier... L'échec du film à sa sortie convaincra le bougon de ne plus trop s'aventurer en dehors des sentiers battus et c'est bien dommage pour tout le monde.