Le Wonder Woman de Patty Jenkins avait de quoi trembler en arrivant dans les salles obscures, tant le DC Extended Universe initié par Man of Steel en 2013 semblait lentement agoniser depuis le dernier très moyen Suicid Squad. Quatrième film de ce feuilleton blockbusterisé, certains l'attendaient comme le sauveur, d'autre scrutaient la catastrophe au box-office. Verdict ?
Des débuts laborieux, certes, qui remuent les bons vieux clichés du genre et semblent au départ ne rien promettre de novateur au spectateur. Heureusement, ce rythme et cette impression s'évaporent bien vite pour permettre à la genèse d'une guerrière amazonienne boudée depuis bien trop longtemps par le grand écran de se mûrir dans une structure narrative convaincante ; pour enchaîner ensuite vers le reste de son histoire dans une progression intéressante. De Themyscira, Diana bascule dans notre monde, avec tout le chaos et la confusion que cela peut supposer. Le film mise sur une sentimentalité archi déjà-vue (l'amour triomphe de tout, même de la guerre) mais qui maintient un certain impact même au milieu des séquences d'action explosives et imposantes (la genèse des Amazones sous forme de fresque vivante, ou même le combat final en sont deux exemples parmi tant d'autres) ; portées par une Gal Gadot impeccable, et possédant cette fois-ci bien plus de matière à développer son personnage que lors de son caméo forcé de Batman v Superman : L'Aube de la justice. L'amour et la paix, le sacrifice et le courage : il pourrait paraître facile de prêcher, mais en dépit de mineures erreurs d'écriture le récit devient rarement ennuyeux. La vision de Jenkins sur ce genre du film de super-héroïne incorporé au contexte de guerre meurtrière n'omet aucunement la terreur et la destruction massive qu'il suppose, et par dessus tout elle échappe singulièrement aux limites des clichés du super-héros voulant faire valoir son humanité. L'humanité de Diana Prince est ici retranscrite par Gadot avec un vrai jeu d'actrice, quelque chose qu'elle ne perd jamais de vue même lorsque son personnage est confronté au mal. Naïve les trois quarts du film, sa sagesse n'en ressortira que solide et authentique. Mention honorable également à Chris Pine en Steve Trevor, avec qui Gadot partage une alchimie étonnamment harmonieuse. C'est le premier film de DC depuis très longtemps qui ramène au premier plan de son histoire une telle distinction viscérale (le lien qui les unit ne ressemble aucunement à celui qui unissait Loïs Lane et Superman deux films précédents ; il paraît plus fragile mais également plus sensé), doublée d'une extravagance visuelle qui regorge de cœur et de raison.
Mais malgré la tension physique et le déluge d'effets visuels, Jenkins équilibre la saveur de son film en injectant de l'humour et de la romance (comme quoi même dans un film estampillé DC c'est possible), allant même jusqu'à les utiliser dans des séquences que le spectateur n'aurait même pas soupçonné. Chris Pine, comme le reste du casting masculin, brille par son jeu d'acteur dans ces moments ; un exploit remarquable pour un protagoniste tiré d'une série de comics qui semble prôner l'autonomisation des femmes (bien que le film ne passe pas à côté de quelques clichés féministes). La séquence où il cherche ses mots pour demander l'aide de Diana pour gagner la guerre en est un exemple frappant : son personnage se décompose pratiquement. Émouvant ou pathétique, à chacun de voir. Il en reste qu'une partie de l'attrait colossal de Steve Trevor est son cœur : il ne le perd jamais, ne l'entend pas toujours, et il le développe à des fins plus inspirantes, jusqu'à atteindre une résolution résonnante, quoique prévisible...
En fin de compte, Wonder Woman n'est pas un film exempt de défauts. Outre des erreurs minimes dans l'écriture négligeant des sous-intrigues ou des traitements de certains personnages, il se heurte forcement aux vérités politiques de l'époque qu'il restitue (la misogynie latente de l'Angleterre du début du XXème siècle) sans pour autant chercher à réellement les justifier ou les dénoncer. Mais c'est un film qui a de l'âme, de l'humour et de l'émerveillement à revendre : en bref un sympathique spectacle narratif présageant, espérons-le, de toutes aussi bonnes augures pour les films qui le suivront dans le DCEU.