Attendu par beaucoup comme le messie envoyé sauver l’honneur d’un prétendu dieu du divertissement stylisé que diverses raisons avaient écarté de son projet, Zack Snyder’s Justice League rappelle une fois encore qu’il faut se méfier des faux prophètes, et que ce gros livre d’images pixélisées et fort laides ne contient pas de cinéma.


Les quatre heures nous assomment de scènes apocalyptiques stériles qui atteignent d’entrée de jeu un point de non-retour dans l’action : comme Snyder filme tout de façon similaire, paroxysme tendu vers le propre dépassement de soi mais qui n’advient jamais, il contraint ses héros à errer et se cogner contre un plafond de verre tels des insectes sous cloche. Le réalisateur ne nous touche jamais parce qu’il se contente de faire se percuter des fantoches qui illustrent sans incarner, privés de profondeur et d’identité véritable. Voilà un périlleux exercice de remplissage qui n’est pas sans évoquer une tendance actuelle, politique en l’occurrence, au verbiage médiatique, l’essentiel étant de tenir le temps voire d’en repousser les limites encore et encore. Nous avons l’impression fâcheuse d’assister à une collection de cinématiques d’un jeu vidéo que viennent inutilement complexifier l’enchâssement des récits ; le manichéisme opposant gentils et méchants demeure intact, noyé seulement sous un déluge artificiel et brouillon, en témoigne la bande originale signée Tom Holkenborg.


Tout est démonstratif et lourdingue malgré l’urgence de la situation : Wonder Woman précise bien à l’ennemi capturé que son lasso révèle la vérité, Aquaman et Batman se taquinent dans une gargote délabrée ; les héros semblent figés dans des poses et des postures prétendument épiques, tel Bruce Wayne au sommet de la montagne regardant le village qu’il s’apprête à rejoindre. Quelle pertinence des plans ? Quel regard porté sur l’humain ou le surhumain ? Rien, sinon une bouillie numérique gonflée à l’humour nul – pensons au costume de chauve-souris qui amuse tant Aquaman, lui qui connaît Gotham City mais ignore l’existence de Batman. Logique. La première mouture de Justice League apparaissait peut-être bâtarde, bancale et expédiée, mais elle avait au moins la qualité de ne pas dépasser les deux heures de film.

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le 18 mars 2021

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