"Je voulais que mon film ne ressemble à aucun autre sorti récemment", c'est un doux euphémisme de la part de Terry Gilliam, en ce début d'été, peu propice à l'audace dans les salles.

En revanche, pour peu que l'on connaisse les classiques de l'auteur, cette dystopie féroce à l'univers steampunk, n'est pas une première.
Si l'affiliation à Brazil est évidente, nous ne sommes plus vraiment dans la dénonciation d'un monde totalitaire.
Cette fois-ci, Gilliam nous interroge sur l'absurdité d'un monde hyper-connecté, générant l'isolement et l'aliénation de l'Homme.

A 73 ans, ce metteur en scène atypique, n'a rien perdu de son énergie et de sa créativité, qui débordent sur chaque plan.
Entre le décor gothique de la chapelle qui sert de prison à Qohen et l'oppression d'un monde extérieur flashy/pop, chaque séquence fourmille d'idée, rappelant aussi l'Armée des 12 singes dans son background ou encore la série Black Mirror, dans sa description d'une société où l'on existe qu'à travers le désir constamment stimulé et la quête -illusoire- d'un bonheur permanent.

L'autre réussite du film réside dans son casting, mais pas forcément là où on l'attendait.
Si Waltz y est remarquable de sobriété, aux frontières de la folie, les seconds couteaux enchaînent les performances.
En premier lieu Mélanie Thierry, seul lien avec le monde réel (et de chair) pour Qohen, touchante, sensuelle et naïve à la fois.
Quant à Tilda Swinton, elle semble prendre un malin plaisir à manier le burlesque comme dans Le Transperceneige.
Enfin, Thewlis (remarquable, comme toujours), Damon (étonnant) et le jeune Hedges (l'autre révélation) manient à merveille le sarcasme à travers des dialogues souvent inspirés.

Le gros problème du film, est sans aucun doute son script, fumeux et confus dans sa structure.
Du moment que Qohen se lance dans la résolution du zero theorem, à part les séquences de réalité virtuelle toujours inventives, le reste nous perd en cours de route, entre dialogues philosophiques à rallonge et glissement vers la folie paranoïaque aux enjeux obscurs.
D'autant plus que son auteur n'a aucunement l'intention de nous donner les réponses, mais de nous questionner.

Par l'absurde, l'humour noir, Gilliam nous maintien en alerte, sur les dérives d'un monde de plus en plus connecté, où l'adage devient de plus en plus "Je tweete, je like, je publie, donc je suis."
Dommage qu'une structure (volontairement ?) chaotique m'aie sorti du film, tant la volonté d'offrir un cinéma différent transpire généreusement sur la pellicule.
Wake_Up_Donnie
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le 28 juin 2014

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Wake_Up_Donnie

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