Si j'avais vu American Psycho lors de mon adolescence, je l'aurai surement classé sans hésiter dans mon Top 10 des films préférés, cotoyant alors Kill Bill, Orange Mécanique et Battle Royale. Du sexe, de la violence gratuite outrancière et un propos sulfureux et cynique sur le capitalisme sauvage. Tous les ingrédients réunis pour satisfaire mes envies de rebellions et de singularité.
Sauf que j'ai désormais 30 ans. Je classe mes factures dans classeurs munies de pochettes plastifiées, je cuisine des risottos et je regarde des films de François Truffaut. Bref, je suis un adulte responsable et exigeant. Le simple fait de filmer des gerbes de sang ne suffisait alors plus à camoufler le propos un peu trop balourd de American Psycho.
Car si la critique du monde de Wall-Street est tout à fait louable et justifiée, je n'ai pas pu m'empecher de trouver ça un peu trop caricatural pour être réellement pertinent. Et c'est un peu la même chose avec les scènes de meurtres. Tellement désinvoltes et outrancières, qu'elles en deviennent presque drôle. L'atrocité est banalisé et par conséquent l'impact que ces meurtres est censé provoquer chez nous est amoindri. Il y a un côté too much dans American Psycho. J'ai eu l'impression qu'on me hurlait dans les oreilles : "Hé ! Regardez comment il est fou le type ! Il tue des gens et il s'en fout ! Wow ! Il est vraiment fou ! Et pourtant il est beau gosse ! Est-ce que son apparence ne serait pas le masque qui cacherait sa monstruosité ? C'est un peu comme le capitalisme, vous trouvez pas ?"
Mais malgré ses outrances, j'ai bien aimé American Psycho. Et je pense que c'est en grande partie grâce à Christian Bale qui porte réellement le film. Cynique, charismatique, glaçant. Parfait pour le rôle.
Au final, les scènes que je retiens du film sont les scènes les moins violentes. Celles qui décrivent le monde de Wall-Street dans toute leur absurdité. La compétition de carte de visite, dont les nuances de blanc traduisent leur position de dominance dans la hierarchie. L'uniformité des protagonistes qui ne parviennent même pas à se reconnaitre les uns les autres. La morning routine interminable de Bateman... C'est drôle et absurde. On ne peut pas s'empecher de penser qu'il n'était finalement pas nécessaire de s'attarder autant sur des meurtres pour critiquer notre société indidualiste et compétitive.
Je trouve que American Psycho souffre du même syndrome que Fight Club. Le propos politique est masqué par le trop plein de divertissement. Ce sont deux très bon films, bien construits, bien écrit. Mais ce sont avant tout des produit de divertissement. Pas les brûlots politiques qu'ils auraient aimé être.