Biopic mais pas vraiment, jazzy mais accessible, ce film sur la femme qui a organisé le concert de Keith Jarrett à Cologne en 1975 surprend agréablement par sa fraîcheur, même s’il reste très classique dans ses ressorts dramatiques et superficiel par rapport à ses thématiques.
Au début des années 1970, Vera (Mala Emde) est une jeune fille issue d’une famille bourgeoise, passionnée de musique. Au grand dam de ses parents, elle préfère les concerts à sa scolarité. Malgré son jeune âge, Vera s’impose peu à peu dans le milieu musical et devient une figure importante de l’organisation de concerts à Cologne. Lorsqu’elle parvient à réserver l’opéra de la ville pour accueillir le génial pianiste Keith Jarrett, elle ne soupçonne pas encore les nombreux obstacles qui l’attendent.
Le cinéma adore rendre hommage à la musique, souvent à travers le biopic, genre calibré pour flatter le génie d’un artiste et attirer son public en salle. Si la recette fonctionne commercialement, elle se révèle souvent ronflante et complaisante sur le plan artistique. Köln 75 parvient à détourner habilement ces codes, tout en s’inscrivant dans la tradition du genre. En suivant Vera Brandes, le film raconte une classique mais efficace histoire d’émancipation, dopée par une bande-son soignée et une énergie communicative portée par ses interprètes. À noter : rares sont les films qui s’intéressent aux organisateurs plutôt qu’aux artistes eux-mêmes, même si on se souvient encore du délicieux Hotel Woodstock d’Ang Lee.
Puis lorsque Keith Jarrett (John Magaro) entre en scène, la tonalité change, le point de vue aussi, sans pour autant sauter complètement du coq à l’âne. Il y a notamment un voyage en voiture Lausanne-Cologne assez mémorable. On passe du point de vue du manager (Vera) à celui de l’artiste (et quel artiste). Le film se pose, devient plus calme, plus intérieur, plus serein. Cette sérénité crée une belle complémentarité avec la première partie, réussissant à articuler continuité et rupture, à l’image d’une bonne jam session.
Ne nous méprenons pas pour autant : les thématiques comme les personnages sont abordés de manière assez superficielle. Les ressorts narratifs restent classiques, voire franchement convenus. Mais la fraîcheur du ton, le dynamisme de la mise en scène et l’enthousiasme du casting transforment cette tentative en joli moment de cinéma et de musique.