Dans un futur "pas si distant", Vincent Freeman est un imposteur: il travaille à la Gattaca Aerospace Corporation sous l'identité d'un certain Jerome Morrow, dans l'espoir de passer pour un être "valide" et de partir un jour en mission, vers les étoiles. Car Vincent est un "invalide": son identité génétique ne lui permet pas de prétendre à un avenir correspondant à ses désirs. Autour de lui, les individus sont jugés sur les caractéristiques, les prédispositions que présentent leurs cellules. Il s'agit donc d'un monde sans espoir, sans surprise, où tout est planifié et anticipé. Vincent va parvenir à dépasser cette fatalité...

La première moitié du film est admirable: la narration, fluide et limpide, nous emporte très loin et nous dévoile surtout le passé d'un personnage très riche et très nuancé. Vincent est un garçon promis à une déchéance physique et à une misère sociale déterminées par son ADN et validées par une société cynique, mais ses rêves de réussite sont encore plus déterminants et sont le moteur de toute sa vie. Andrew Niccol prend le temps de nous familiariser avec les règles de cet univers, mais également avec son esthétique (décors et photographie sont exceptionnels): l'environnement dans lequel évoluent les personnages n'a pas cette abstraction, cet artifice que présentent parfois les œuvres d'anticipation, et nous semble d'autant plus inquiétant et oppressant (Gattaca est une structure aseptisée, traversée d'espaces vides interminables, et d'une froideur très actuelle).

Les choses se gâtent avec l'amorce d'une histoire d'amour inutile et superflue entre Vincent et sa collègue, Irene: l'originalité de la mise en scène et surtout du scénario s'en ressentent (surgissent ainsi des dialogues prévisibles et niaiseux..."c'est au moment où il faut partir que l'on trouve une raison de rester", murmure Vincent à Irene); le rythme tiédit, devient plus commun. La scène d'amour après la fuite du couple obéit aux conventions les plus banales et les plus rebattues.

Au terme de cette parenthèse de clichés indignes, le récit retrouve un sursaut de vie et s'achève avec beaucoup de force et une certaine poésie. Le message de "Bienvenue à Gattaca" est simple, presque simpliste, mais il est transmis avec un tel savoir-faire et une perspective si personnelle qu'il est impossible de ne pas être touché par l'itinéraire de Vincent.


Frankoix
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le 12 août 2010

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