J'aime bien Disney. Mais mon point de vue sur la production vieille ou récente a changé maintes fois durant mon existence. Tout d'abord je fus pris d'émerveillement lorsque je ne fus pas plus haut que trois pommes. Puis, durant mon adolescence, je me suis mis à vomir ces dessins animés, les qualifiant de trop gentils, trop niais. Enfin, devenu jeune adulte d'une vingtaine d'années, je me suis ravisé à nouveau, découvrant qu'un Disney pouvait être très intelligent, très profond et nettement moins niais que je ne l'aurais jamais cru. Le problème c'est que lorsqu'on découvre quelque chose comme ça, on a tendance à généraliser. Je me suis donc mis en tête que les premiers longs métrages Disney étaient tous des petites perles au message énorme. En fait, non. C'est un à priori aussi naïf que tous les autres que j'ai pu avoir.

"Blanche Neige et les sept nains" n'est pas un GRAND dessin animé. La première féministe venue n'éprouvera aucune difficulté à démolir les thèmes que porte le film. C'est vraiment très gnangnan, il ne se passe pas grand chose (très peu de conflits) et en plus les auteurs font la part belle au deus ex machina.

Pourtant j'y ai trouvé de l'intérêt, narrativement ! Lequel ? L'art de la digression, de l'étirement temporel. Il ne se passe rien parce qu'on n'a plus le temps de peaufiner l'intrigue. Le bon vieux Walt préfère, par exemple, passer 3 minutes à montrer les nains qui s'endorment plutôt que de corcer les enjeux. Quels enjeux? On voit tout ce qu'on ne voit pas habituellement dans un film et le tout est chanté. Blanche Neige range, nettoie, les nains rentrent du travail (on dirait que le chemin du retour leur prend plus de temps que le travail en lui-même). Les ellipses ne sont pas pour autant bannie du film. Il y en amême beaucoup au début du film, ce qui donne un rythme un peu trop effreiné. En fait, les ellipses ne surgissent que lorsque l'histoire est en marche, quand il faut avancer dans l'intrigue. Le reste du temps, c'est un étirement vicieux du temps.

Je retiens également cette méchante sorcière. Un peu bêbête à imaginer des plans tirés par les cheveux pour éliminer la princesse d'un royaume peuplé de fantômes (le château a l'air inhabité, les environs aussi). Mais c'est aussi pour ça qu'on l'aime, car dans tout ce qu'elle fait, elle se montre méchante, vile. C'est un personnage simple mais traité avec jusqu'auboutisme, et ça, ça manque aujourd'hui (satané anti-manichéisme).

Mais ne nous leurrons pas. Le véritable intérêt de ce métrage d'animation, ce n'est pas le scénario qui n'aurait sans doute pas marché en live, mais bien la technique graphique prodigieuse. Depuis l'animation des personnages en rotoscopie, jusqu'aux magnifiques décors, en passant par les traditionnels moments psychédéliques (souvent dans une forêt). Tout est beau, juste, poétique. Les expressions font mouche tant dans le registre de la tendresse que du comique ou de la peur.

Bref, "Blanche Neige et les sept nains" est un dessin animé un peu hypnotique, qui laisse un sentiment d'arrêt dans le temps et ce grâce à un scénario qui privilégie la digression à l'action ; c'est aussi un dessin animé très beau graphiquement que l'on ne se lasse pas de dévorer des yeux. Pas mon préféré de Disney, mais assurément un très bon moment.
Fatpooper
8
Écrit par

Créée

le 19 févr. 2014

Critique lue 465 fois

11 j'aime

5 commentaires

Fatpooper

Écrit par

Critique lue 465 fois

11
5

D'autres avis sur Blanche-Neige et les Sept Nains

Blanche-Neige et les Sept Nains
Docteur_Jivago
7

Magie éternelle

Si j'adhère totalement, et ce enfant ou non, à l'animation japonaise ou Pixar, je dois reconnaître mon inculture totale en ce qui concerne Disney excepté Fantasia, petite pépite découverte il n'y a...

le 23 déc. 2015

72 j'aime

26

Blanche-Neige et les Sept Nains
Gand-Alf
8

How to make a princess.

Vous allez penser que je suis fou, inconscient, que je n'ai rien d'autre à faire ou que je suis tout simplement con. Et vous aurez probablement raison. Toujours est-il que par une nuit noire et...

le 27 févr. 2015

57 j'aime

16

Blanche-Neige et les Sept Nains
Rawi
9

une enfant de 80 ans

Je vais parler ici de ma première expérience de cinéma. Le premier film que j'ai vu en salle. Je dois avoir 5 ans et il pleut. Je suis en compagnie de ma marraine (si vous me redemandez ailleurs si...

Par

le 20 nov. 2017

42 j'aime

10

Du même critique

Les 8 Salopards
Fatpooper
5

Django in White Hell

Quand je me lance dans un film de plus de 2h20 sans compter le générique de fin, je crains de subir le syndrome de Stockholm cinématographique. En effet, lorsqu'un réalisateur retient en otage son...

le 3 janv. 2016

122 j'aime

35

Strip-Tease
Fatpooper
10

Parfois je ris, mais j'ai envie de pleurer

Quand j'étais gosse, je me souviens que je tombais souvent sur l'émission. Enfin au moins une fois par semaine. Sauf que j'étais p'tit et je m'imaginais une série de docu chiants et misérabilistes...

le 22 févr. 2014

122 j'aime

45

Taxi Driver
Fatpooper
5

Critique de Taxi Driver par Fatpooper

La première fois que j'ai vu ce film, j'avais 17ans et je n'avais pas accroché. C'était trop lent et surtout j'étais déçu que le mowhak de Travis n'apparaisse que 10 mn avant la fin. J'avoue...

le 16 janv. 2011

110 j'aime

55