Ca peut paraitre cliché de dire ça, mais "je ne comprends vraiment pas ce que les gens trouvent à ce film". Si ce machin est un film culte alors nous sommes tombés bien bas. Et puisqu'il est primordial d'étayer son opinion personnelle par des arguments, voici une liste de ce qui selon moi ne va pas dans ce film.
Ce film transpire voire pue à la fois le pseudo-mindfuck movie, le teenage movie et le film américain de base. Le mélange des trois s'est imposé à mes yeux comme un cocktail incroyablement raté, de la même manière que j'avais éprouvé une envie de vomir à la fin de Mr. Nobody. Et le film possède selon moi les mêmes tares : un rythme beaucoup trop lent, faussement contemplatif mais vraiment ennuyeux, avec un usage abusif et injustifié des ralentis, en clair de la masturbation formelle ; une photographie, des décors, une manière de filmer esthétisée à l'extrême, "à l'américaine", mais pour un rendu par conséquent incroyablement aseptisé et sans âme, sans caractère particulier autre que la représentation et l'ambiance classique d'une ville américaine lambda d'un film américain lambda. Dommage.
Sur le côté mindfuck movie "à l'intrigue géniale et aux interprétations nombreuses", c'est encore une fois la comparaison avec Mr. Nobody qui s'impose, à savoir celle d'une grande fumisterie intellectuelle. Les informations sont envoyées n'importe comment et avec prétention dans ce que les gens voient comme un dosage captivant. J'y vois de la pure masturbation cache-misère d'un scénario post-it. Toutes les informations sont soit volontairement (et mal) occultées puis distillées, soit complètement HS. Quelles sont celles véritablement importantes? Le héros a des problèmes de personnalité, doublé de facultés de perception dans le temps. Ah, je crois que c'est tout. Ah si : j'ai compris en regardant la scène du retour dans le passé qu'on peut créer une des scènes les plus grotesques et mal emmenées de l'histoire du cinéma et toujours penser être crédible. Le pire c'est que ça sembler marcher.. Putain ! Regardez un Eternal Sunshine of the Spotless Mind pour ce qui est des mindfuck movie américains un peu teenage mais tout de même réussis.
Sur le côté "véritable reflet et satire de la société américaine, du système éducatif", laissez moi vous dire que tout cela n'est que de la poudre aux yeux, car pas du tout traité si ce n'est à grands coups de clichés à la vue des différents personnages tous plus stéréotypés les uns que les autres, à l'exception de Jake Gyllenhaal qui sauve le film et est l'unique réceptacle de la trop rare intelligence insufflée dedans.
Et c'est à mes yeux le plus grand problème du film. A vouloir traiter trop d'aspects différents -peinture de la société américaine, du système éducatif, du contexte politique, traitement de la dichotomie peur/amour, de la psychologie et de l'exclusion sociale, de la rationalité et de la spiritualité, des voyages dans le temps et des dimensions parallèles, de l'existentialisme- il n'en traite aucun bien. Même le seul aspect pouvant à priori être sympa, à savoir l'aspect malsain et dark du film, est raté. A la place, il baigne dans une atmosphère faussement inquiétante qui ne se concrétise jamais. Les scènes avec Frank censées représenter les pointes d'oppression se révèlent être trop courtes et trop inertes, trop peu chargées en hémoglobine, en violence ou en cruauté pour être crédibles dans leur aspect inquiétant. J'avais été intéressé par ce film par un rapprochement avec le jeu Hotline Miami -le coup du masque de lapin sans doute...-. Putain ! Si vous voulez une véritable et jouissive dose de viscéral, de rougeoyant, de malsain, d'absurde et d'étrange en termes de traitement abouti de scénario dark, ruez vous dessus et laissez ce torchon de film au public qu'il mérite : des groopies de Jared Leto de 14 ans débarquée de Mr Nobody, trop heureuses de se sentir enfin intelligentes dans les futiles interprétations d'un scénario qui ne devrait faire mousser et réfléchir qu'elles..
Edit : Southland Tales, du même réalisateur, est selon moi , beaucoup plus adapté à son style. Tout aussi foisonnant, le film aborde chaotiquement une tripotée de thèmes -l'apocalypse, la drogue, l'obsession sécuritaire, la troisième guerre mondiale, Marx, Jésus, la fiction et la réalité- mais de manière totalement décomplexée, à l'image de l'apparition de Christophe Lambert, qui sort de nulle part mais qui ne prétend pas apporter quelque chose à l'ensemble. Et c'est la clef de réussite du film : il parle de tout mais ne prétend rien. C'est plus une fresque pop vaseuse mais assumée -et donc plaisante- qu'une œuvre faussement dense et cohérente mais vraiment prétentieuse, et c'est bien mieux comme ça.
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