Après Les forbans de la nuit, probablement son chef d'oeuvre, Jules Dassin commence à connaître réellement les effets de la chasse aux sorcières. Il lui faudra cinq années avant de tourner son film suivant, en France cette fois, il s'agira d'une adaptation d'Auguste Le Breton, révélé depuis peu dans la littérature policière comme le pape de l'argot et des bas-fonds parisiens.


Sorti une semaine avant Razzia sur la Schnouf et bien longtemps avant le Clan des Siciliens, Du rififi chez les hommes déborde d'originalités de toutes sortes. Mélange improbable du film noir américain et du policier français, il permet aussi à Jules Dassin de confirmer sa maîtrise du paysage urbain, proposant juste après New-York, San Francisco et Londres une nouvelle visite particulière avec un Paris particulièrement bien représenté.


La préparation du casse (puisque oui, nous sommes ici dans un caper movie dans toute sa splendeur) est remarquable de précision et de maîtrise. Le cambriolage en lui-même étant un sommet de mise en scène qui vaut à lui seul la vison du film. Loin des codes habituels, il préfigure ici des films d'évasion comme Un condamné à mort s'est échappé et surtout Le Trou dans une forme d'épure et de minutie qui transmet merveilleusement la tension du moment.


Avec ça, le film est tout de même beaucoup moins intéressant avant et après le casse et ses préparatifs. La faute à un casting de seconde zone qui n'apporte au film ni la présence des stars hollywoodiennes ni la gouaille des vedettes françaises. Si Jean Servais s'en sort le moins mal, il a tout de même du mal à tout porter sur ses frêles épaules, et ce n'est pas son associé mal doublé qui aide beaucoup, ni le rital rigolard, ni-même Jules Dassin lui-même en spécialiste des coffres-forts sous pseudonyme. Et rien que le souvenir de Robert Hossein en jeune drogué manque de me soulever le coeur...


Avec ça, les rôles féminins sont presque tous abominables, je ne sauve que la gentille italienne, mais ça ne va pas suffire. Il y a en plus un affreux gosse qui m'a donné des frissons à chaque apparition et qui est pour beaucoup dans ma sévérité actuelle. Quant à la tentative de réussir un numéro de music-hall à l'américaine au milieu du film, on va vite jeter un voile pudique sur le résultat et demander à Magali Noël de nous promettre de ne plus jamais recommencer.


M'enfin, rien que pour Paris et la cambriole, vous pouvez le voir, n'en attendez pas forcément beaucoup plus parce que du coup, ça déçoit un petit peu...

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le 18 janv. 2013

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Torpenn

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