“Empire du Soleil” pourrait simplement se résumer à l’Itinéraire d’un enfant gâté (inoubliable Christian Bale), que la guerre transformera en adulte, mais ce serait réducteur face à l’ampleur dramatique, voire quasi-mythologique de cette épopée signée Steven Spielberg, inspirée du roman éponyme de J.G. Ballard (“Crash !”). À Shanghai en décembre 1941, dans une ville en plein essor, qui se tourne vers l’Ouest - l’immense mur où s’affiche “Autant en emporte le Vent” en témoigne - James “Jim” Graham (Christian Bale), un jeune anglais, vit avec ses parents dans les quartiers occidentaux de la ville chinoise, alors sous occupation japonaise depuis 1937. Un calme relatif mais précaire règne sur l’immense cité de l’Empire du milieu. Pour les européens, l'insouciance est de mise, loin du conflit mondial. Les brunchs, les soirées mondaines et masquées sont légion. Steven Spielberg en profite pour filmer une diaspora aveuglée par ses privilèges, sans pour autant oublier la vision d’une nation qui souffre sous le joug d’un ennemi implacable. Le prologue fait de cercueils éventrés flottant devant la proue d’un navire est là pour nous rappeler que la guerre existe bel et bien et que le danger est imminent. Pour l’heure, le jeune James Graham nous est présenté comme un enfant turbulent (la scène de la chorale), conscient de son milieu social (déplaisant avec ses domestiques chinois). En bref, un adolescent contemporain, dont les préoccupations sont à cent lieues de celles des adultes. Tout va basculer le 8 décembre 1941, lorsque le Japon - par l’entremise de l’attaque de Pearl Harbor - déclare la guerre aux États-Unis. Pour les occidentaux, le sanctuaire qu’est Shanghai, devient vite l’enfer. L’armée nippone - alors en retrait en périphérie de la ville - investie quartier par quartier en raflant tout sur son passage. Lors d’une bousculade devenue une véritable émeute, James est séparé de ses parents. Seul, livré à lui-même dans une ville assiégée, il réussit à rejoindre sa maison qui n’est plus que désolation. Après plusieurs jours d'errance, le voici bientôt - à la manière d’Oliver Twist - devenu le larbin de Franck (Joe Pantoliano) et Basie (John Malkovich), un duo d’opportunistes escrocs américains. Mais bientôt, l’adolescent et les deux hommes sont faits prisonniers. A cet instant précis, “Empire du Soleil” - qui - dans sa première partie - se trouve être un magistral drame sous fond de conflits sous-jacents, emportant tout sur son passage (avis perso) - se mue en un récit d’aventures souvent empreint de fulgurances (l’attaque du camp, la lumière atomique et le final, notamment), mais parfois conformiste et académique, comme Spielberg - le réalisateur familial des années 80 - l’affectionne. Nous sommes loin de la portée dénonciatrice de “La Liste de Schindler” ou encore de “Munich”. Je n’ose imaginer ce que le Mel Gibson enragé de “Apocalypto” ou encore de “Tu ne tueras point” aurait pu faire en adaptant “Empire du Soleil” (note personnelle). Qu’importe, car durant 2h30 environ, sous l’impulsion d’un Christian Bale en état de grâce (choisi parmi des centaines d'enfants), cette relecture de classiques historiques tels que “Le pont de la rivière Kwaï” et “La Grande évasion” à la sauce Spielberg, nous a fait et nous fera toujours trembler, parfois sourir et à chaque fois pleurer. Après tout, c’est ce que l’on est en droit d'espérer du cinéma !!!

RAF43
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le 8 oct. 2022

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