Garde à vue par Ciné Water
J'apprends aujourd'hui, jeudi 5 avril 2012, le dècès de Claude Miller.
Si je n'ai pas vu l'intégralité de sa filmographie - je ne connais au fond que ce film, Garde à vue et son premier long, La meilleure façon de marcher - je considère que le premier m'a énormément marqué.
Réunissant un environnement idéal pour faire un très bon film : Lino Ventura en inspecteur de police déterminé de la culpabilité du notaire Michel Serrault, ce dernier marié à la sublime Romy Schneider.
Dérrière la caméra je retiens surtout Michel Audiard aux dialogues, bien loin de la comédie mais toujours aussi délicieux et George Delerue à la musique à qui on doit pêle-mêle :
Jules et Jim, Le Mépris qui sera repris par Scorcese pour Casino, Le Corniaud, Le dernier métro son troisième et dernier César ou encore Platoon.
Pour en revenir à Audiard, la motivation de Miller - d'un film qui ne devait être qu'une commande - ne tient qu'à lui. Lassé de mettre des paroles sur des navets, cette idée de huit-clos l'attire carrément.
Je lis, au détour de sites relatant son décès, un titre "Claude Miller, cinéaste de l'intime" et plus loin dans l'article une citation du dit Miller :
«Je ne me vois pas tourner une charge de cavaliers. La forme symphonique n'est pas mon fait. Ce qui me passionne dans la démarche cinématographique, c'est de m'attacher au plus près au jeu des apparences, gestes, regards, comportements et d'essayer de faire deviner l'intérieur des êtres, leur jardin secret, alors qu'on ne voit d'eux que l'extérieur.»
Cette citation se prête incroyablement bien à Garde à vue et à ses acteurs.
D'un inspecteur Ventura qui dit se foutre royalement de la personnalité du coupable du viol et du meurtre d'une petite fille tant qu'il le trouve, alors qu'au fond la culpabilité d'un notaire - comme lui précise ce dernier - l'arrangerait plus que celle du noir ou de l'arabe du coin car plus médiatique et du coup plus apte à lui faire gravir les échelons mais également moins fatiguante si ce coupable s'avère être déjà dans son bureau.
Du notaire Serrault, personnage cynique disposant autant de répartie que de froideur, coupable idéal.
De sa femme Schneider, qui a épousé son mari du départ d'une sorte d'accord non déclaré entre eux du mari qui épouse une belle femme et d'une femme qui épouse un mari riche.
Un film fort psychologiquement dans les gestes, les regards, comportements auxquels j'ajoute les silences de ces personnages.
Un film également très noir.
Mais surtout un film très intense, riche en tensions dont je n'ai pu m'empêcher de rester scotché du début à la fin.