Ermites de Sisyphe.
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En ces périodes troublés de début 2022, où toute la planète essaye de comprendre ce que veut faire Poutine, il faut revenir aux fondamentaux. Probablement un des films les plus connus de la filmographie de De Niro ou de Pacino, pourtant si peu cité dans la plupart des conversations.
Le genre de film qu'il faut revoir au moins une fois tous les ans, tellement il est immense.
Lorsque je l'ai vu étant ado, Heat est immédiatement rentré dans mes films préférés. La classe, l'atmosphère, l'impression d'assister à un immense travail complexe et avec de multiples niveaux de lectures, la mise en scène délirante, le cadrage incroyable, des scènes à couper le souffle, et la confrontation des 2 acteurs monstres qui imposé leur marque sur le cinéma américain comme rarement avant et après eux.
Pourtant, Heat est ce genre de film "connu", mais qui n'a pas eu un succès délirant à sa sortie, ni même encore aujourd'hui. Un film culte, certes, mais il n'aura jamais autant célébré qu'un Piège de Cristal, Dark Knight ou qu'un Seven. Même au niveau du culte Reservoir Dogs le dame le pion de façon assez certaine dans les milieux cinéphiles. Je n'ai déjà d'ailleurs jamais compris pourquoi Michael Mann, malgré tout le respect de la profession, n'est pas plus encensé, comme un certain McTiernan dans son temps.
Pourtant, en terme de thriller urbain, et film policier et d'action, Heat se pose là. Il reste seloin moi le plus grand polar de ces 30 dernières années, et très peu de films ont pu se mesurer à sa hauteur. Un immense chef d'oeuvre, une claque galactique dans la tronche des spectateurs tellement Michael Mann a plongé dans le travail d'une vie pour sortir tout ce qu'il aimait du genre. La mise en scène est exceptionnelle : aussi intime que grandiloquente, sociale, brute, extrêmement bien travaillé et bien monté, avec des moments poétiques et calmes, puis des scènes d'une grande violence. On se souvient évidemment de la rencontre mythique dans le restaurant, mais aussi la scène de fusillade, extraordinaire, ou la scène de fin, elle- aussi haletante.
Dans ce jeu du chat et de la souris, le scénario nous traite aussi bien la vie de ces 2 hommes, aussi mélancoliques, cyniques que désabusés, que celle d'une photographie de la ville de Los Angeles dans les années 90. Le scénario tient habilement à nous montrer cette poursuite entre deux hommes qui au font sont pareils, qui traite avec grande subtilité leur parcours, et par cette lumière tout en noir et en bleu, excelle à nous montrer tous les rapports sociaux et leur hiérarchie dans ce monde très réglé de la police et des gangsters. Dans un film de cet ampleur, c'est aussi la description d'un monde finissant, très politique, celui des années 60-70, où les deux personnages principaux tentent de se raccrocher à un espoir vain.
Les seconds rôles sont excellents, que cela soit Kilmer, Voight, Sizemore, Judd, Fichter, Portman, Brenneman, et bien d'autres, et apportent une pierre à l'édifice, et donnent vraiment bien la réplique à nos deux anti- héros. La BO donne une tension crescendo à l'ensemble qui permet de s'immerger parfaitement dans le stress qu'ils endurent. La photographie est splendide, et nous permet d'admirer certains des plus beaux plans de l'histoire du cinéma (ah ces nuits bleutés !).
Mais pourquoi ce film- là, en particulier, devance tous les autres dans ce genre ? Heat, c'est un immense hommage à Peckinpah, qui n'aurait pas renié ce film. Heat est crepusculaire, plein de dépression et de désespoir. Un dernier combat avant la fin pour deux hommes qui ont cru qu'ils allaient enfin goûter à la vie qui leur échappe, l'un qui a trop vu de morts sur sa route, incapable d'aimer, et l'autre qui a trop pensé qu'il pouvait partir loin d'ici, incapable de comprendre que sa vie est déjà derrière lui.
Heat touche au sublime car c'est une critique radicale du vide existentiel de cette société et de ces héros, qui pensaient la changer, alors qu'ils simplement vu passer et qu'ils se sont détruits de l'intérieur, poursuivant des choses qui n'ont jamais existé. Onirique, émouvant et poignant par moments, que même les scènes d'action et de braquage, parmi les meilleures jamais réalisés, sont relégués au second plan.
Clairement, un des plus grands films américains de tous les temps, et j'insiste et je signe, le plus grand film policier et thriller de ces 30 dernières années.
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Créée
le 13 mars 2022
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