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Hors-saison
5.5
Hors-saison

Film de Stéphane Brizé (2023)

Avec Hors-saison, Stéphane Brizé prend le contre-pied de sa trilogie sur le monde du travail. Il s’en détache sans le renier, pour signer un film d’une grâce calme, rigoureuse, souvent très touchante. La mise en scène, faite de plans fixes, de légères scissions, d’espaces pensés, installe un rythme singulier, presque flottant.

Brizé étire les scènes. Il laisse le temps s’installer, parfois jusqu’au décalage. Dans la première moitié du film, cela donne lieu à un burlesque discret, porté par un Guillaume Canet qu’on n’avait peut-être jamais vu aussi drôle. Son interprétation d’un comédien à succès en crise, entre ironie et fatigue, touche juste. Il excelle dans cette veine de comédie dépressive, sans appuyer. Certaines scènes, par leur rythme et leur ton, évoquent le cinéma de Tati, sans imitation.

Le film se distingue aussi par la qualité de son écriture, signée Marie Drucker, non seulement pour les dialogues mais pour l’ensemble du scénario. Il y a là une justesse rare, un art de faire parler sans démontrer, de créer de la présence sans surligner. Et cette manière d’étirer les échanges leur donne un poids singulier, une respiration.

Puis le film bifurque. Alba Rohrwacher entre dans le cadre, et tout s’infléchit. Elle est venue retrouver un amour ancien, sans drame, sans emphase. Son sourire solaire, sa beauté fulgurante, suffisent à modifier la tonalité. Le burlesque s’efface. Les regards prennent le relais, les silences aussi. Une histoire d’amour s’installe, presque banale, mais d’une justesse rare. Rien n’est souligné, et pourtant tout est là.

Les paysages bretons, superbes, filmés avec retenue, participent à ce climat de retrait, de douceur suspendue. La musique de Vincent Delerm, mélancolique sans pathos, accompagne parfaitement ce mélange de légèreté et de mélancolie, au diapason de l’univers de Brizé.

On comprend que le film ait pu désorienter. Sa lenteur, son refus du spectaculaire, le rendent parfois insaisissable. Mais si l’on accepte ce rythme, Hors-saison se révèle. Un film discret, fragile, élégant, qui laisse une empreinte douce et durable.

elrenardo1
8
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le 8 août 2025

Critique lue 3 fois

elrenardo1

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