Le film déploie ses atours comme un manteau trop lourd. A voir sur Arte Cinéma (YT)

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Il est des films qui prennent la passion pour de la grandeur et la jalousie pour du destin. Jeanne la folle de Vicente Aranda appartient à cette lignée flamboyante où la tragédie amoureuse se confond avec la chronique d’un naufrage politique. Mais ce qui aurait pu être un requiem royal devient ici un mélodrame compassé, un opéra sans souffle où la folie se réduit à un caprice de cour. Pilar López de Ayala, remarquable de ferveur, brûle à l’écran d’un feu qui n’éclaire personne : elle incarne Jeanne comme une martyre de l’amour absolu, mais Aranda, trop fasciné par l’ornement, oublie la fièvre intérieure. Daniele Liotti, en Philippe le Beau, se contente d’une arrogance de vitrine : sourire d’ambition, regard vide, séduction mécanique. Tout respire la reconstitution appliquée, non la chair de l’Histoire. Le film déploie ses atours comme un manteau trop lourd : palais flamands, cierges, dorures, vitraux — splendeur saturée, où chaque plan étouffe sous la beauté décorative. Aranda, autrefois capable de violence baroque, s’abandonne ici à un esthétisme d’embaumeur. L’amour devient procession, la folie, protocole. Même la musique, pourtant somptueuse, ne parvient plus à rompre la torpeur. Reste un thème magnifique, que le film trahit : la confusion du pouvoir et du désir, du trône et du lit, du sacré et du charnel. Jeanne la folle aurait pu être une tragédie de l’incandescence ; il n’est qu’une fresque qui tremble d’ennui. Sous le voile des passions, on ne trouve que le vide des ors. Et lorsque Jeanne s’abîme dans la démence, c’est moins la raison qui s’effondre que la mise en scène elle-même, incapable de choisir entre le cri et la prière. Ma note : 10 / 20

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